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Transparence et moralisation : les élus rivalisent de propositions

Depuis l'affaire Cahuzac, députés et ministres proposent des opérations "mains propres", en publiant leur patrimoine ou voulant moraliser la vie politique.

Le Monde

Publié le 08 avril 2013 à 20h46, modifié le 09 avril 2013 à 09h54

Temps de Lecture 6 min.

Elles fleurissent de toutes parts en ce début de printemps. Les tribunes, interviews, publications de toutes sortes en faveur d'une moralisation de la vie politique se multiplient depuis le début de l'affaire Cahuzac. Alors que le gouvernement doit dévoiler un projet de loi sur la question d'ici au 24 avril, de nombreux élus rivalisent d'inventivité pour se démarquer avec leurs propositions, quitte à parfois en ressortir d'anciennes des tiroirs, ou de donner le sentiment d'un concours Lépine des initiatives en faveur de la transparence.

Lire : "Affaire Cahuzac : la contre-offensive de l'Elysée" (édition Abonnés)

  • La publication de patrimoine

Tous les candidats à la présidentielle, élus, ministres ou dirigeants d'organismes publics sont obligés de remplir des déclarations de patrimoine, qui atterrissent sur le bureau de la Commission pour la transparence financière de la vie politique, qui les contrôle mais a l'interdiction de les rendre publiques.

Quelques hommes et femmes politiques ont pris l'initiative ces derniers jours de publier leur propre déclaration. Le dernier en date, l'UMP François Fillon, l'a fait lundi 8 avril au journal de 20 heures sur France 2. Avant lui, Laurent Wauquiez, député de Haute-Loire, avait dévoilé ses possessions dans Le Journal du dimanche. Patrick Mennucci, le député PS des Bouches-du-Rhône, avait publié dès mercredi une note sur son blog, recensant ses biens immobiliers et ses comptes.

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Pour ne pas être en reste, Matignon a annoncé que tous les membres du gouvernement publieraient d'ici au 15 avril leur déclaration de patrimoine. Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée aux personnes handicapées, l'a déjà fait sur son blog.

Europe Ecologie-Les Verts soutient cette opération "mains propres" et a annoncé que ses élus prendraient des dispositions en ce sens. Dans une tribune, Barbara Pompili et François de Rugy, qui codirigent le groupe écologiste à l'Assemblée nationale suggèrent de leur côté que les déclarations de patrimoine soient accessibles pour la presse. Notons toutefois que ces publications restent déclaratives et que Jérôme Cahuzac avait publié son patrimoine.

  • Un durcissement des contrôles de l'argent des élus

Idée en vogue : celle d'un renforcement des mécanismes de surveillance des élus et des ministres. Gérald Darmanin, député UMP du Nord, proche de Xavier Bertrand, plaide ainsi pour "un contrôle fiscal systématique à chaque déclaration de candidature" pour les mandats de parlementaires, et la publication du "contenu de ce contrôle avant le scrutin". Le fisc devrait donc se pencher sur les dossiers de l'ensemble des candidats dans les 577 circonscriptions.

Pour les écologistes, il faut imposer "la déclaration annuelle de chaque membre du gouvernement de l'ensemble des rémunérations qu'il a perçues". "Imposons la transparence de la réserve parlementaire, faisons du compte rendu de l'utilisation des frais de mandats des élus une obligation", ajoutent Barbara Pompili et François de Rugy. Ces derniers suggèrent également de mettre en place un contrôle de la réserve parlementaire, cette somme d'argent dont les députés disposent pour leur territoire.

De son côté, Carlos Da Silva, élu socialiste de l'Essonne, prépare également une tribune pour proposer d'étendre ces contrôles aux membres des cabinets parlementaires.

  • La création d'une Haute autorité

Le socialiste Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des Lois de l'Assemblée nationale, a suggéré pour sa part la création d'une Haute autorité pour contrôler le patrimoine des élus, ainsi que la participation des citoyens à la prévention des conflits d'intérêts. Dans un entretien au Figaro, le député propose de "rationaliser les moyens" pour contrôler le patrimoine des élus.

Cette Haute autorité "absorberait la commission pour la transparence, mais aussi le service central de prévention de la corruption qui dépend de la Chancellerie, et encore la commission de déontologie de la fonction publique". "Confions-lui la mission de contrôle des déclarations individuelles d'intérêts et d'activités remplies par les acteurs publics", explique l'élu du Finistère dans son entretien. "Imaginons un dispositif ouvert 'd'alerte éthique' tel que le rapport Jospin l'a préconisé", poursuit-il.

  • L'inéligibilité à vie

François Hollande l'avait esquissé dans sa déclaration, Jean-Marc Ayrault l'a confirmé : "Comme l'a indiqué le président de la République, toute personne qui sera condamnée [pour fraude fiscale et corruption] ne pourra plus exercer de mandat public." La proposition plaît à Laurent Wauquiez à l'UMP : "Je propose qu'un juge puisse prononcer l'inéligibilité à vie pour tous les cas d'enrichissement personnel." Mais une telle mesure pourrait vite se heurter à des obstacles de type constitutionnel.

  • Interdire les activités parallèles pour les élus

Christian Assaf, député PS de l'Hérault, plaide dans une tribune sur Mediapart pour une "interdiction d'exercer une activité professionnelle pour tout parlementaire et chef de gros exécutifs". Il réclame également la "publication des activités professionnelles de chaque élu 5 ans avant et 5 ans après l'élection", afin d'éviter le pantouflage ou les conflits d'intérêts.

Sa proposition fait écho à la colère de Harlem Désir lundi matin, qui estime que "les députés avocats d'affaires, ça suffit !" Interrogé sur i>Télé, le premier secrétaire du Parti socialiste a expliqué que "lorsqu'on est élu (...), qu'on est détenteur d'un intérêt général, d'un intérêt public, on n'a pas à gagner de l'argent par des activités privées. On ne fait pas de la politique pour faire des affaires." Laurent Wauquiez, de l'UMP, souhaite lui que "les clients et les honoraires" soient publiés quand un parlementaire a des activités parallèles comme avocat d'affaires. Une qualité qu'a Jean-François Copé.

  • Un référendum pour trancher

Dix élus PS ont publié, dès la fin de la semaine dernière, une tribune dans Le Monde, pour défendre l'idée d'une consultation populaire sur les questions de moralisation de la vie politique, "à choix multiples". Signée par Jean-Christophe Cambadélis ou le numéro 2 du parti, Guillaume Bachelay, le texte prévoit une modification de la Constitution avec notamment une révision du statut pénal du chef de l'Etat. Harlem Désir propose aussi un référendum sur les mesures de moralisation évoquées par François Hollande.

Lire aussi : "Dix députés PS prônent un référendum à choix multiples"

La proposition pourrait trouver un écho à droite. Laurent Wauquiez, dans son interview au JDD, se dit "favorable" à un référendum sur une loi pour la moralisation de la vie politique : "Un remaniement n'est pas à la hauteur de la crise. Hollande a perdu la confiance des Français. Qu'il propose par référendum des mesures de transparence et les Français jugeront s'ils lui accordent encore du crédit." Mais, prévient le député de l'UMP, si le non l'emporte, le président devra en tirer les conséquences, "comme en son temps le général de Gaulle", c'est-à-dire en démissionnant.

  •  Un renforcement du non-cumul des mandats

Pour éviter une consultation populaire couperet, des socialistes suggèrent de leur côté de faire une consultation sur plusieurs questions. L'occasion pour eux de remettre sur la table le non cumul des mandats, dès 2014. "L'interdiction du cumul d'un mandat parlementaire avec celui d'un exécutif local pourrait être soumise à l'arbitrage citoyen. ( ...) Cette innovation pourrait alors s'appliquer dès 2014", explique les dix élus socialistes dans leur tribune.

Si l'idée ne fait pas encore florès dans les rangs de la droite, des élus sont sensibles à certains arguments. Gérald Darmanin propose ainsi de limiter "le cumul dans le temps à trois mandats". Le député UMP du Nord assortit sa proposition de deux autres : "Empêchons les élus d'être éligibles au-delà de l'âge de la retraite imposé à tous les Français et faisons en sorte que devenir ministre implique de démissionner définitivement de son mandat de parlementaire."

  • Garantir l'indépendance de la justice

Enfin, une réforme de la justice est envisagée dans tous les camps. Dans leur tribune dans Le Monde, les députés socialistes envisagent la suppression de la Cour de justice de la République, "afin que les ministres en fonction et mis en examen soient jugés par une juridiction ordinaire, et non plus par leurs pairs". Une mesure déjà envisagée dans le projet de réforme constitutionnelle du gouvernement.

Sans préciser les modalités, Christian Assaf veut de son côté la "garantie d’une indépendance absolue de la justice et de la presse par des réformes de fond".

A droite, Gérald Darmanin voudrait au contraire un renforcement des pouvoirs de l'Assemblée, pour la transformer en "véritable chambre de contrôle de l'exécutif". "Faut-il permettre aux services de justice et de police de contrôler les parlementaires pendant l'exercice de leur mandat ?, s'interroge-t-il. Dans une démocratie, il n'est jamais bon que l'exécutif ait un moyen de pression sur les élus du peuple."

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