C’est un énième « nouveau départ » pour la Deutsche Bank (DB), empêtrée dans une interminable crise depuis le début de la décennie. La première banque allemande a annoncé, dimanche 7 juin, la démission de ses deux codirigeants, Anshu Jain et Jürgen Fitschen, deux ans avant la fin de leur contrat. John Cryan, ancien haut dirigeant de la banque suisse UBS, doit prendre la tête de la banque dès le 1er juillet et mettre en œuvre la nouvelle stratégie annoncée fin avril.
Cette démission met fin à plusieurs semaines de tension chez Deutsche Bank, où le mécontentement des actionnaires et des salariés était devenu assourdissant. Anshu Jain, considéré comme l’homme fort – et le plus critiqué – du duo dirigeants, devra quitter son poste dès la fin du mois. Jürgen Fitschen restera pour sa part aux côtés du nouveau PDG jusqu’en mai 2016, le temps d’assurer une transition en douceur après cette brutale démission. Après cette date, M. Cryan tiendra seul les rênes de la banque.
Défiance
Jamais, dans l’histoire de la banque, la défiance des actionnaires vis-à-vis de ses dirigeants n’avait été si clairement exprimée. Le 21 mai dernier, lors de l’assemblée générale, seuls 61 % des actionnaires avaient renouvelé leur confiance aux deux manageurs – contre 95 % habituellement –, au terme d’une série de discours accablants sur la direction de la banque et la faiblesse du cours de l’action. Rien d’étonnant à cela : les trois semaines précédant l’assemblée générale avaient offert aux actionnaires et à l’opinion publique un résumé consternant des problèmes qui grèvent la banque depuis des années.
Le 23 avril, la DB s’est acquittée d’une amende record de 2,5 milliards d’euros pour son implication dans l’affaire de la manipulation des taux interbancaires Libor et Euribor. Un montant colossal, qui s’explique entre autres par le manque de coopération de la DB dans l’enquête de la justice américaine. Le 27 avril, la banque a présenté en catastrophe sa nouvelle stratégie pour les cinq prochaines années, au terme de mois de discussions ouvertes.
La banque prévoit notamment de se séparer de sa filiale Postbank et de réduire ses activités d’investissement. Une stratégie qui a finalement déçu les investisseurs et atterré les salariés. Enfin, le 29 avril, le codirecteur du groupe Jürgen Fitschen comparaissait devant le tribunal de Munich pour son implication supposée dans l’affaire Leo Kirch, ruinant un peu plus la crédibilité de l’établissement.
7000 contentieux
La Deutsche Bank est actuellement impliquée dans 7 000 contentieux, les litiges impliquant dans leur quasi-totalité des établissements bancaires dans le monde. Une grande partie concerne les activités de la banque d’investissement, un département dirigé pendant des années depuis Londres par… Anshu Jain. Tragique fin pour ce banquier né en Inde, considéré comme un des plus brillants de la City, entré à la Deutsche Bank il y a tout juste vingt ans avec le rêve d’en faire une banque universelle de premier plan au niveau mondial.
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