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Un rapport parlementaire préconise le report de la fermeture de Fessenheim

Selon ses auteurs, un arrêt dès 2016 des deux réacteurs de la centrale pourrait coûter 5 milliards d'euros à l'Etat, « sans même commencer le démantèlement ».

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Publié le 30 septembre 2014 à 04h01, modifié le 30 septembre 2014 à 13h09

Temps de Lecture 4 min.

La centrale nucléaire de Fessenheim, en avril 2013.

Le gouvernement n'a toujours pas réglé le « cas Fessenheim » dans le cadre du projet de loi sur la transition énergétique, dont l'examen commence, mercredi 1er octobre, à l'Assemblée nationale.

La centrale nucléaire alsacienne va-t-elle fermer avant la fin du quinquennat, comme le président de la République s'y était engagé au cours de sa campagne, ouvrant la voie à d'autres arrêts pour réduire de 75 % à 50 % (par rapport à 2012) la part de l'électricité d'origine nucléaire en 2025 ? 

Un rapport parlementaire de la commission des finances, que Le Monde a reçu mardi 30 septembre, préconise le report de la fermeture de Fessenheim « au vu du contexte budgétaire contraint ». Selon ses deux auteurs, Hervé Mariton (UMP, Drôme) et Marc Goua (PS, Maine-et-Loire), un arrêt dès 2016 pourrait ainsi coûter 5 milliards d'euros à l'Etat, « sans même commencer le démantèlement ».

COÛT SOCIAL ET INDEMNITÉ D'EDF

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La fermeture aurait en effet un coût social de 1 milliard d'euros. Le site génère 1 900 emplois directs, indirects et induits, et sa fermeture aurait un impact négatif sur le revenu de 5 000 personnes, rappellent les rapporteurs.

De son côté, EDF pourrait réclamer « une indemnité de l'ordre de 4 milliards d'euros pour avoir été obligé de fermer ses deux réacteurs avant l'heure », préviennent-ils. Avant l'heure signifie, pour eux, avant 2040 dans l'hypothèse où l'ASN autoriserait une telle prolongation (courante aux Etats-Unis).

Le rapport évoque en outre « un impact négatif sur la balance commerciale française », puisque la production de Fessenheim est « valorisable sur le marché de gros de l'électricité à hauteur de 430 millions ».

« Il n'existe objectivement aucune raison de sélectionner le site de Fessenheim plutôt qu'un autre, concluent les parlementaires. Les investissements prescrits par l'ASN et réalisés par l'exploitant sur les deux réacteurs garantissent le plus haut niveau de sûreté. »

« PRAGMATISME »

Des « calculs farfelus » et un « chantage » destinés à peser sur les décisions, a dénoncé la ministre de l'écologie et de l'énergie, Ségolène Royal. « Normalement, c'est Fessenheim que l'on ferme », avait déclaré Mme Royal, dimanche 28 septembre, au Grand Rendez-vous Europe 1-Le Monde-I-Télé. Mais à la question de savoir si ce serait bien elle qu'EDF devrait arrêter, Ségolène Royal avait répondu : « Je ne sais pas encore ».

Mardi matin, sur France Inter, elle a prévenu qu'elle examinerait « avec beaucoup de pragmatisme quelles sont les propositions de l'entreprise par rapport au choix le plus judicieux, c'est-à-dire quels sont les deux réacteurs qui coûtent le plus cher en terme d'investissement pour être remis aux normes ».

Fin juillet, le député du Haut-Rhin où est implantée la centrale de Fessenheim, Michel Sordi (UMP), avait demandé au PDG d'EDF, Henri Proglio, de fermer un autre site.

« Evidemment, a ajouté Mme Royal, ma préférence va vers la fermeture de réacteurs sur un site où il y a plus de deux réacteurs parce que ça évite la fermeture complète d'un site industriel ». Fessenheim n'a que deux réacteurs, alors que Bugey (Ain) et Tricastin (Drôme) en ont quatre et Gravelines (Nord) six. Ces réacteurs ont été mis en service entre 1979 et 1981.

PLAFONNEMENT DE LA CAPACITÉ NUCLÉAIRE FRANÇAISE

Pour le délégué interministériel à la fermeture de Fessenheim, Jean-Michel Malerba, c'est bien elle qu'il faut « objectivement » arrêter. « Elle n'a pas la possibilité d'utiliser du combustible retraité, du Mox [mélange d'uranium et de plutonium], que la France fabrique [dans l'usine Melox d'Areva], alors que les centrales qui ont suivi peuvent le faire ». En outre, c'est « la plus mauvaise du parc électronucléaire du point de vue des performances économiques ».

Un point est acquis : il faudra fermer au moins deux réacteurs de 900 mégawatts (MW) pour compenser l'entrée en service de l'EPR de Flamanville (Manche), soit 1 650 MW, prévue en 2016. La loi sur la transition énergétique prévoit, en effet, un plafonnement de la capacité nucléaire française à son niveau actuel de 63,2 gigawatts (GW).

Les dirigeants d'EDF souhaitent, eux, prolonger l'exploitation d'un maximum de réacteurs jusqu'à 60 ans. M. Proglio l'avait dit sans ambages en 2013, même s'il se montre désormais plus prudent dans son expression publique à l'approche de son éventuel renouvellement, fin novembre.

MULTIPLICATION DES INCIDENTS

EDF estime être capable de financer les travaux nécessaires à une telle prolongation de l'exploitation en toute sécurité. Les mouvements écologistes et anti-nucléaires rappellent, eux, que les incidents se sont multipliés ces dernières années à Fessenheim et que c'est la centrale la plus dangereuse de l'Hexagone.

Seule juge de la conformité de la centrale aux normes internationales, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) française est favorable à la prolongation pour dix ans de la doyenne des centrales françaises, dont les deux réacteurs ont été mis en service en 1978. A condition qu'EDF en améliore la sûreté, ce que l'opérateur historique a fait notamment en renforçant le radier de béton sur lequel reposent les réacteurs. Si la sûreté prime sur tout autre considération, le coût de la fermeture entre également en jeu.

Lire aussi (édition abonnés) : Article réservé à nos abonnés Le démantèlement des centrales et la gestion des déchets corsent le coût du nucléaire

La promesse de campagne de François Hollande demeure, et le gouvernement devra trancher. Le départ des Verts du gouvernement a retiré à Manuel Valls un sujet de conflit au sein de sa majorité, mais les Verts n'en sont que plus libres pour dénoncer les atermoiements de la majorité.

Barbara Pompili, coprésidente du groupe écologiste à l'Assemblée nationale, attribue ce rapport au « lobby nucléaire ». Il défend un outil industriel construit entre les années 1960 et 1980 et tente d'« éviter l'inéluctable », a-t-elle déclaré, mardi, au micro de RFI. La plupart des 58 réacteurs du parc français sont « des 2 CV au regard de la sécurité nécessaire ».

Lire aussi en édition abonnés : Article réservé à nos abonnés Transition énergétique : une batterie de mesures pour une « croissance verte »
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