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En Libye, le premier ministre du gouvernement de Tobrouk visé par un attentat

Les motivations des attaquants n’étaient pas clairement établies, mais seraient liées aux tensions entre Abdullah Al-Thinni et l’homme d’affaire Hassan Tatanaki, qui mène depuis quelques mois une véritable campagne contre le premier ministre.

Par  (Tunis, correspondant)

Publié le 27 mai 2015 à 17h38, modifié le 27 mai 2015 à 17h24

Temps de Lecture 3 min.

Le premier ministre du gouvernement libyen de Tobrouk, Abdullah Al-Thinni, le 15 avril 2015 à Moscou.

Le premier ministre du gouvernement libyen reconnu par la communauté internationale, Abdullah Al-Thinni, a affirmé mardi 26 mai avoir été victime d’une tentative d’assassinat à Tobrouk (est), nouvel épisode du chaos dans lequel la Libye n’en finit pas d’être plongée. « Dieu merci, nous en avons réchappé », a-t-il déclaré dans la soirée à la chaîne de télévision saoudienne Al-Arabiya. Un de ses gardes du corps aurait été blessé.

L’incident s’est produit à l’issue d’une journée tourmentée autour du Parlement de Tobrouk, assemblée dont l’élection en juin 2014 avait été validée par la communauté internationale mais que conteste un Parlement rival, le Congrès général national (CGN), basé à Tripoli. L’Assemblée de Tobrouk est soutenue par une coalition de libéraux, d’anti-islamistes et d’ex-kadhafistes. Pour sa part, le GNC de Tripoli, qui a formé son propre gouvernement, est dominé par une coalition où les islamistes exercent une influence significative à défaut d’être exclusive.

« Opération pas très professionnelle »

Mardi, le premier ministre Al-Thinni devait s’exprimer devant le Parlement de Tobrouk, mais la séance n’a pas tardé à être perturbée par des manifestants rassemblés à l’extérieur du bâtiment. Certains d’entre eux étaient armés. Les protestataires, hostiles à la gestion du premier ministre, réclamaient sa démission. Devant la tension grandissante, Al-Thinni a été obligé de quitter précipitamment l’assemblée hébergée au sein d’une base navale. Alors que le convoi prenait la direction de l’aéroport de Tobrouk, son véhicule a été visé par des tirs. « L’opération n’était pas très professionnelle, dédramatise un diplomate occidental en poste à Tunis. S’ils avaient vraiment voulu tuer Al-Thinni, ils n’auraient pas tiré sur une voiture blindée. »

L’identité et les motivations réelles des manifestants n’étaient pas clairement établies mercredi. Selon Mohamed Eljarh, chercheur libyen affilié au cercle de réflexion américain Atlantic Council – et proche du camp de Tobrouk –, la probabilité que ces protestataires soient liés à l’homme d’affaire Hassan Tatanaki est élevée. Richissime tycoon libyen réfugié en Egypte, M. Tatanaki, présent dans l’exploitation pétrolière, l’immobilier et les médias, orchestre depuis quelques mois une véritable campagne contre Al-Thinni. La chaîne de télévision dont il est le propriétaire, Awalan TV, multiplie les attaques contre le premier ministre.

« Il y a une volonté claire de M. Tatanaki de mobiliser les gens contre Al-Thinni », assure Mohamed Eljarh. Selon ce dernier, l’origine du conflit tient dans l’ambition de M. Tatanaki – et contrée par Al-Thinni – d’être nommé à la tête de la Libyan Investment Authority (LIA), le fonds souverain libyen riche de 59,9 milliards d’euros. Avec la Banque centrale et la National Oil Company (NOC), la LIA est l’une des institutions financières que se disputent les deux gouvernements rivaux de Tobrouk et Tripoli.

Option militaire contre les adversaires de Tripoli

L’autre grand rival d’Al-Thinni au sein du camp de Tobrouk est le général Khalifa Haftar, nommé début mars chef d’état-major de l’armée. Ancien proche de Mouammar Kadhafi avant d’enter en dissidence à la fin des années 1980, le général Haftar se fait le chantre d’une mobilisation contre les « terroristes » et les « extrémistes », label sous lequel il mêle djihadistes radicaux et l’ensemble des milices reconnaissant l’autorité du CGN de Tripoli.

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Le général Haftar et Hassan Tatanaki, qui passe pour l’un des principaux bailleurs de fonds du camp de Tobrouk, partagent la même volonté de recourir à l’option militaire contre leurs adversaires de Tripoli. Ils disposent de solides soutiens en Egypte. Si les relations entre le général Haftar et le premier ministre Al-Thinni ont souvent été conflictuelles, il semble qu’elles se soient récemment apaisées. « Les deux hommes se sont rapprochés », assure Mohamed Eljarh. Selon d’autres sources, leurs relations demeurent toutefois « mauvaises ».

Quoi qu’il en soit, les tensions internes à ce camp de Tobrouk promettent de compliquer la tâche de l’envoyé spécial des Nations unies, Bernardino Leon. Ce dernier s’efforce – en vain, pour l’instant – de rapprocher Tobrouk et Tripoli autour d’un plan de gouvernement d’union nationale afin de mettre un terme à ce chaos libyen dont l’Etat islamique (EI) profite pour s’enraciner dans le pays. Après trois moutures d’accord rejetées – par l’un ou l’autre des deux camps –, M. Leon est sur le point de proposer ces prochains jours une quatrième version. Un climat de révolution de palais à Tobrouk ne pourrait qu’entraver d’avantage le processus.

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