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Charb, le rire d'abord

Stéphane Charbonnier, alias Charb, également directeur de la publication, aimait par-dessus tout rire et faire rire. Aucun sujet n'était à l'abri de son trait épais.

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Publié le 07 janvier 2015 à 14h55, modifié le 08 janvier 2015 à 17h27

Temps de Lecture 3 min.

Charb, directeur de la publication de

C'est un dessin tristement prémonitoire qu'a signé Charb, directeur de la publication de Charlie Hebdo, dans le numéro paru mercredi 7 janvier. Agé de 47 ans, le dessinateur figure parmi les douze victimes de l'attentat perpétré, le même jour, au siège de l'hebdomadaire, dans le 11e arrondissement de Paris. Sur ce dessin titré « Toujours pas d'attentats en France », on voit un djihadiste déclarer : « Attendez ! On a jusqu'à la fin janvier pour présenter ses vœux. »

Le dernier dessin de Charb, paru dans

L'assassinat de Charb, comme celui de Cabu, Wolinski, Tignous ou Honoré, décime le monde des dessinateurs de presse et provoque une indignation sans frontières. Charb disait récemment ne pas craindre les menaces… Quelques jours après avoir publié les caricatures du prophète Mahomet, en septembre 2012, il avait déclaré dans nos colonnes ne pas avoir peur d'éventuelles représailles. « Je n'ai pas de gosses, pas de femme, pas de voiture, pas de crédit. C'est peut-être un peu pompeux ce que je vais dire, mais je préfère mourir debout que vivre à genoux. »

Charb bénéficiait d'une protection policière depuis l'incendie volontaire du journal en novembre 2011, après la publication d'un numéro spécial « Charia Hebdo », comprenant des caricatures du prophète Mahomet. Depuis 2006, et la première polémique sur la publication de ces caricatures, Charlie Hebdo s'était habitué aux menaces de mort, mais n'a jamais renoncé. « J'ai encore du mal à réaliser qu'un dessin puisse susciter ce type de réactions, ça ne mérite ni la mort ni l'incendie », disait-il dans un entretien à la chaîne LCP.

« DÉCONNEUR RIGOUREUX »

Né le 21 août 1967 à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), Stéphane Charbonnier, alias Charb, a grandi à Pontoise (Val-d'Oise). C'est au lycée, où il s'ennuyait, que le dessin est devenu sa passion. En 1991, cet autodidacte a participé au lancement de La Grosse Bertha, hebdomadaire satirique, qui comptait aussi dans son équipe Philippe Val. Jeune dessinateur de 25 ans, Charb quitte le journal un an plus tard et fait partie de l'équipe refondatrice de Charlie Hebdo, orchestrée par Philippe Val, avec les « historiques » Cabu, Gébé, Cavanna ou Wolinski, mais aussi Luz ou Riss, tous deux tout jeunes dessinateurs comme lui.

Il prend la tête de l'hebdomadaire satirique en mai 2009, aux côtés de Riss, à la suite du départ de Philippe Val à France Inter. Sans effets de manches. Riss décrivait Charb comme un « déconneur rigoureux ». « Charlie Hebdo est fils de Mai-68, de la liberté, de l'insolence, et de personnalités aussi clairement situées que Cavanna, Cabu, Wolinski, Reiser, Gébé, Delfeil de Ton […]. Il aura aidé à former l'esprit critique d'une génération. En se moquant certes des pouvoirs et des puissants. En riant, et parfois à gorge déployée, des malheurs du monde, mais toujours, toujours, toujours en défendant la personne humaine et les valeurs universelles qui lui sont associées. » C'est ainsi que Charb définissait son journal dans une tribune intitulée « Non, Charlie Hebdo n'est pas raciste », publiée dans Le Monde le 21 novembre 2013.

Aucun sujet n'était à l'abri de son trait épais et de ses trognes allumées. Charb aimait les plaisanteries, même du plus mauvais goût, et adorait l'irrévérence, l'insolence, comme dans sa série « Maurice et Patapon », où il mettait en scène un chien obsédé sexuel et un chat sadique.

Charb se défendait de provoquer des violences avec ses dessins. « Je n'ai pas l'impression d'égorger quelqu'un avec un feutre. Je ne mets pas de vies en danger. Quand les activistes ont besoin d'un prétexte pour justifier leur violence, ils le trouvent toujours », déclarait-il dans nos colonnes en 2012. Avec ses lunettes de myope, son T-shirt rayé et son pull camionneur, le directeur de Charlie avait un air d'éternel adolescent. Charb aimait par-dessus tout rire et faire rire, et son regard pétillant en était l'illustration. « C'est l'éclat de rire qui décide », disait-il. Ce regard vient de s'éteindre.

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