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La Ville de Paris va « dialoguer » avec les migrants du lycée désaffecté rue Jean-Quarré

La Mairie assure vouloir proposer un hébergement aux personnes présentes sur le site ; mais les centres d’accueil sont pleins.

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Publié le 04 août 2015 à 01h24, modifié le 04 août 2015 à 11h16

Temps de Lecture 3 min.

Des migrants réfugiés dans une annexe du lycée Guillaume-Budé à Paris, le 2 août 2015.

« On s’attend à un arrivage (sic) de Calais, où la situation est devenue très difficile, mais aussi de Vintimille », assure Hervé Ouzzane, membre du collectif « La Chapelle en lutte ». Ancien tenancier de boîte de nuit, il était déjà très présent auprès des migrants de la rue Pajol (18e arrondissement), évacués le 29 juillet ; il campe désormais avec la centaine de migrants qui, depuis le 31 juillet, ont trouvé refuge dans un lycée technique professionnel désaffecté du 19e arrondissement de Paris. Hervé Ouzzane avait utilement récupéré, rue Pajol, tous les vivres non consommés et en avait rempli un grand chariot en disant, « ça peut servir ». Il n’avait pas tort.

Après avoir tergiversé durant le week-end, la maire de Paris Anne Hidalgo a finalement renoncé à envoyer la police déloger les étrangers du lycée. « Ces migrants ont, au péril de leur vie, traversé le Sahara, la Méditerranée, ils ont fui la guerre en Afghanistan, au Soudan ou, pour les Erythréens, une dictature sanglante : la France mais surtout Paris leur doivent l’hospitalité et l’accueil, a déclaré, lundi 3 août, Bruno Julliard, premier adjoint à la maire de Paris. Nous avons choisi le dialogue et notre méthode porte ses fruits : d’abord recenser les personnes, puis leur proposer un hébergement d’un mois, quelle que soit leur situation. Pas dans des hôtels mais dans des centres où ils peuvent dormir, se nourrir, accomplir leurs démarches administratives. Bien que l’accueil des migrants soit de la compétence de l’Etat, la Mairie de Paris s’implique pour faire face à cette crise migratoire d’une ampleur sans précédent. »

Sous le préau, des migrants, en majorité afghans, mais aussi érythréens,  soudanais, libyens, tchadiens jouent au football pour passer le temps.

Ballottés d’un centre à l’autre

Rue Jean-Quarré, l’ancien lycée hôtelier, un méchant bâtiment des années 1970 vide depuis quatre ans, se prête plutôt bien à cette vie collective. Les classes sont devenues des dortoirs pour la centaine d’hommes présents, le préau fournit une ombre bienvenue et les rares prises électriques sont toutes saturées de chargeurs de téléphones portables, tandis que la cour accueille les jeux de ballon, pour tuer l’ennui.

Dans les petits groupes, rassemblés par nationalité – des Soudanais, les plus nombreux, des Erythréens, des Tchadiens mais aussi des Libyens, des Maghrébins, quelques Maliens et des Sénégalais –, l’ambiance semble détendue, même si chacun, en baroudeur aguerri, garde son bagage à l’œil. Abdel Quafar, 34 ans, parti du Darfour en 2008, passé par la Libye puis par la Grèce, est en France depuis 2012 ; Aziz Bara, son compatriote ouvrier dans le bâtiment et Khider Ismail, ancien cameraman, ont suivi à peu près le même périple.

Tous trois ne se font pas prier pour montrer le précieux titre de réfugié qui leur donne le droit d’être en France et d’y travailler, mais qui ne suffit pas pour y obtenir un logement et un emploi. Ils ont déjà été beaucoup ballottés d’un centre à l’autre, d’une association à l’autre : « Ce que nous souhaitons, c’est nous intégrer à la communauté française, mais c’est difficile », juge Abdel Quafar. A ses côtés, deux jeunes, arrivés depuis deux jours, découvrent les méandres administratifs français.

Traités de « vichystes »

Le squat est donc solidement chaperonné par le collectif « La Chapelle en lutte », qui refuse de se constituer en association et dont certains membres se font appeler par un pseudonyme. Ils filtrent les entrées et monopolisent la communication avec la Ville, dont les représentants venus, samedi 1er août, vérifier la sécurité électrique et tenter un premier recensement se sont fait vertement éconduire et auraient été traités de « vichystes ».

Le collectif assure qu’une fois les listes dressées, il est difficile d’y faire admettre de nouveaux arrivants. Or, ceux-ci sont déjà en route car la nouvelle du squat du lycée Jean-Quarré s’est propagée à la vitesse d’un feu de forêt : une vingtaine de Soudanais ont quitté le campement des quais d’Austerlitz, où ils stationnaient depuis des mois, pour s’installer ici ; une douzaine d’Afghans, descendus de la gare de l’Est, ont rejoint, lundi, leurs compatriotes.

Le collectif de soutien appelle de ses vœux une grande maison d’accueil des migrants à Paris, ce à quoi le ministère de l’intérieur se refuse. Quant au généreux discours de la Mairie de Paris, il se heurte à la pénurie de places d’hébergement. Tous les centres sont pleins et, selon la préfecture d’Ile-de-France, 1 300 migrants ont déjà été accueillis, depuis le 1er juin, dans des centres censés rester fermés l’été, et qui ont été rouverts pour l’occasion. 

« Nous verrons si la situation est tenable », avance prudemment M. Julliard à l’Hôtel de ville. Il ne souhaite pas créer un point de « cristallisation » et rappelle qu’il y a d’autres campements, notamment celui d’Austerlitz et ses 250 migrants, qui vivent de plus en plus durement la cohabitation avec les fêtards noctambules de la Cité du design et des péniches alentour : « C’est notre priorité », affirme-t-il.

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