François Hollande a élevé, vendredi 9 octobre, Michel Rocard au rang de grand-croix de la Légion d’honneur, la plus haute distinction française.
Le président, qui n’a jamais fait partie de la mouvance rocardienne, a salué la « fidélité », la « morale » et la popularité de l’ancien premier ministre de François Mitterrand. Le chef de l’Etat a ainsi évoqué le long parcours d’un homme encarté au PS depuis soixante-dix ans, qui a « réformé la France et, à force de persévérance, parfois en avance sur son temps, a porté des textes iconoclastes devenus lois de la République ».
Dans un discours faisant écho aux débats traversant la société, le président a lancé :
« Vous avez changé l’Etat, vous l’avez rendu moins centralisé, plus juste. Vous avez cherché à apaiser la société et réformer la France. Nul besoin de rupture pour réformer. C’est l’apaisement qui produit la réforme et c’est la réforme qui produit l’apaisement. »
« Vous rêviez d’un pays où l’on se parle de nouveau, d’une politique qui serait attentive à ce qui est dit et non à qui la dit. C’est toujours d’actualité, et j’ajouterai : hélas ! » Le qualifiant de « rêveur idéaliste et de réformiste radical », M. Hollande a érigé M. Rocard en « exemple » pour tous les gouvernants.
« Dominer le capitalisme est un devoir pour le socialisme »
Quelque 200 invités ont participé à la décoration de l’ex-chef du gouvernement, parmi lesquels le ministre de l’économie Emmanuel Macron et le premier ministre Manuel Valls, lui même héritier revendiqué du rocardisme.
M. Hollande a rappelé en plaisantant l’unique candidature de M. Rocard à un scrutin présidentiel en 1969 – d’abord candidat en 1981, il s’était finalement retiré de la course : « Ce sera la première et la dernière fois. Je dis la dernière : je devrais être prudent ! », suscitant les rires de la salle.
Dans sa réponse au chef de l’Etat, procédure inhabituelle dans une telle cérémonie et voulue par M. Hollande, Michel Rocard, 85 ans, a plaidé, dans un discours également très actuel, pour le « retour de la parole et du dialogue » :
« Aucun de ces mots : “contrat”, “négociation”, “accord”, “convention” n’apparaît dans notre Constitution, comme si le mot “négociation” était imprononçable, vulgaire. Le capitalisme sait et peut produire pour tous mais il ne le fait pas. (...) Dominer le capitalisme est un devoir pour le socialisme. »
Michel Rocard, 85 ans, a été premier ministre de 1988 à 1991 et député européen de 1994 à 2009. Il est actuellement ambassadeur de France chargé de la négociation internationale pour les pôles arctique et antarctique.
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