Des numéros inscrits sur les mains de migrants. Le procédé ne manque pas de rappeler les années sombres du nazisme, et l’initiative de la police tchèque a provoqué l’indignation de plusieurs juristes et de militants des droits humains, mercredi 2 septembre.
La veille, les forces de l’ordre avaient utilisé des marqueurs pour inscrire une série de chiffres sur la peau de 214 réfugiés, en majorité syriens, interpellés à la frontière à bord de trains venant d’Autriche et de Hongrie.
Une procédure justifiée par la forte présence d’enfants parmi eux et le souci d’éviter que ces derniers ne se perdent, explique une porte-parole du ministère de l’intérieur. La porte-parole de la police des étrangers a elle aussi défendu une mesure destinée à protéger les familles. « Nous inscrivons également le code du train à bord duquel ils voyagent, pour savoir vers quel pays nous devrons les renvoyer en cas de réadmission. »
« Ils ont accepté le marquage »
Selon cette dernière, les intéressés « recevaient habituellement des numéros sur des feuilles de papier, mais s’empressaient de les jeter ». « Ils ont accepté le marquage, ils n’ont pas de problème avec cela, ils savent que c’est dans leur intérêt », a-t-elle ajouté.
Un argument loin de satisfaire les hommes de loi et les militants humanitaires. « Aucune loi ne permet de marquer les gens de cette manière », a dénoncé Zuzana Candigliota, avocate de la Ligue des droits de l’homme en République tchèque. Pour elle, l’approbation des migrants est avant tout liée au fait « qu’ils pensent que le policier a le droit de le faire ». « La situation est difficile car les réfugiés n’ont pas de papiers d’identité. Mais du point de vue de la loi, ce n’est pas correct », a, de son côté, mis en avant un juriste praguois, Marek Dufek.
L’Europe commet « un suicide »
Contrairement à d’autres Etats européens, la République tchèque maintient que les migrants illégaux doivent être renvoyés vers le pays par lequel ils sont entrés dans l’Union, invoquant le règlement de Dublin qui le stipule. Et les autorités semblent bénéficier du soutien de leurs administrés : un sondage réalisé au mois d’août auprès de 1 040 Tchèques a révélé que 93 % d’entre eux pensaient que les réfugiés doivent être renvoyés dans leur pays d’origine.
Mardi, l’ancien président de la République Vaclav Klaus (2003-2013) avait déclaré que l’immigration n’est « pas un droit de l’homme ». Cet eurosceptique convaincu avait fermement dénoncé, dans une interview au site Internet du journal Dnes, les propos de nombreux dirigeants de l’Union, dont le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, jugeant « scandaleuse » l’attitude de certains pays de l’Est à l’égard des réfugiés. « Si l’Europe veut commettre un suicide en recevant un nombre illimité de migrants, qu’elle le fasse, mais sans notre accord. »
Les premiers ministres hongrois, polonais, slovaque et tchèque se réuniront vendredi à Prague pour discuter de l’actuelle crise migratoire.
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