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Michel Platini est officiellement candidat à la présidence de la FIFA

Le dirigeant français de l’UEFA a annoncé mercredi qu’il briguait la succession du Suisse Joseph Blatter.

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Publié le 29 juillet 2015 à 09h49, modifié le 29 juillet 2015 à 14h37

Temps de Lecture 8 min.

Michel Platini — ici le 30 juin 2015 — est candidat à la présidence de la FIFA.

Depuis plusieurs semaines, ses intentions devenaient de plus en plus claires. A 60 ans, l’ex-star des pelouses Michel Platini souhaite écrire une nouvelle page de sa légende en accédant à la fonction suprême. Mercredi 29 juillet, le dirigeant français de l’Union européenne de football association (UEFA) a officialisé sa candidature à la présidence de la Fédération internationale de football association (FIFA). L’ancien numéro 10 des Bleus briguera donc la succession de son ancien mentor et allié Joseph Blatter, 79 ans et au pouvoir depuis 1998.

Emporté par la succession d’affaires de corruption qui ont ébranlé le gouvernement du football mondial, le Suisse avait annoncé, le 2 juin, qu’il remettrait son mandat lors d’un « Congrès électif extraordinaire », organisé le 26 février 2016, à Zurich. Le Valaisan avait pourtant été réélu, le 29 mai, pour un cinquième mandat, malgré les appels à la démission lancés la veille par Platini.

« Cela a été une décision très personnelle, et mûrement réfléchie. Il y a des moments où vous devez prendre votre destin en mains. Je suis arrivé à l’un de ces moments décisifs », a expliqué le patron de l’UEFA, dans sa déclaration de candidature envoyée aux 209 fédérations nationales qui constituent le Congrès de la FIFA. Fuyant les demandes d’interviews, le natif de Joeuf (Meurthe-et-Moselle) a prévu de s’exprimer devant les médias, à Monaco, lors du tirage au sort de la Ligue des champions, qui aura lieu à la fin d’août. Le 20 juillet, en marge de la réunion du comité exécutif de l’instance internationale, l’ex-meneur de jeu s’était dit « agréablement surpris » par la vague de soutiens qu’il venait de recevoir. Il bénéficiait alors de l’appui de quatre Confédérations continentales, dont celles d’Amérique du Sud (Conmebol), d’Amérique du Nord et centrale (Concacaf) et d’Asie (AFC). « Platoche » avait notamment entamé des pourparlers avec le cheikh bahreïnien Al-Khalifa, patron de l’AFC, ainsi qu’avec l’influent cheikh koweïtien Al-Sabah, tous deux membres du gouvernement de la FIFA.

« Michel ne prendra pas de risque »

S’il doit également convaincre les Confédérations africaines (CAF) et océanienne (OFC), principales terres d’élection de « Sepp » Blatter, le président de l’UEFA aurait d’ores et déjà le soutien d’au moins 140 fédérations nationales. Il bénéficie en outre de l’appui d’Herbert Hainer, le PDG allemand d’Adidas, l’un des sponsors historiques de la FIFA. Selon l’agence American Press (AP), le patron de l’UEFA aurait rencontré, mercredi 22 juillet, le prince jordanien Ali Ben Al-Hussein, candidat malheureux contre Blatter (battu 133 voix à 73) le 29 mai, lors du dernier congrès de la FIFA. Ce membre de la famille royale hachémite avait à l’époque reçu le soutien de Platini et de l’UEFA. Il avait ensuite donné l’impression de vouloir se lancer une nouvelle fois dans la course à la présidence après l’annonce de l’abdication prochaine du Valaisan.

« Michel Platini n’a besoin du soutien de personne, affirme en souriant un président d’une fédération européenne. C’est la FIFA qui a besoin du soutien de Michel. S’il veut le poste, il l’aura. Seul un idiot choisirait de concourir contre lui. Il sera le vainqueur incontesté. Personne ne lui arrive à la cheville. » « Il vaut mieux qu’il sorte tôt du bois pour éradiquer les velléités de ses adversaires, confiait, il y a quelques jours, l’un des proches du patron de l’UEFA. Il a une belle opportunité. »

« Michel ne prendra pas de risque. Il s’est dit : “Si j’y vais, c’est que je suis sûr de gagner”, assurait au Monde, en août 2014, un ancien pilier de la FIFA. Si Blatter n’y était pas allé en 2015, Michel y aurait été, et il aurait gagné. » A l’époque, l’ancien numéro 10 avait préféré se représenter pour un troisième mandat à la tête de l’UEFA plutôt que défier le Suisse dans les urnes. « Ce n’est pas mon heure, pas encore », insistait-il alors. Le 28 mai, il avait affirmé qu’il réviserait son jugement après le « départ » de « Sepp » Blatter de la FIFA.

Dépôt des candidatures le 26 octobre

Alors que le journal espagnol AS a récemment affirmé que Platini confierait les rênes de l’UEFA au patron de la Fédération allemande, Wolfgang Niersbach, le triple Ballon d’or (entre 1983 et 1985) a jusqu’au 26 octobre pour faire valider sa candidature, soit quatre mois avant le scrutin. Farouche opposant de l’arbitrage vidéo, il a désormais tout le temps de présenter sa plate-forme programmatique. Qui pourrait barrer la route de l’ancien sélectionneur des Bleus (1988-1992) ? En dehors du prince Ali, seuls l’ex-légende brésilienne « Zico » et Musa Hassan Bility, président de la Fédération du Liberia ont jusqu’à présent indiqué qu’ils se lanceraient dans la course. Vice-président de la FIFA de 1994 à 2011 et patron de l’empire Hyundai, le Sud-Coréen Chung Mong-joon pourrait, lui aussi, se présenter.

« J’ai hâte d’avoir une conversation animée avec Monsieur Platini, glisse au Monde Musa Hassan Bility. Je crois qu’il ne représente pas le vrai changement, celui qui est approprié. Nous devrions penser différemment. Nous avons besoin de dirigeants nouveaux avec des idéaux nouveaux pour nous extraire des temps troubles. La FIFA n’a pas été dirigée seulement par Monsieur Blatter. Il n’est pas responsable de tout ce qui a mal tourné à la FIFA. Monsieur Platini doit se préparer à clarifier son rôle dans tout ça. Mais si le monde veut seulement voir la FIFA sortir de l’orbite de Blatter et que sa gouvernance ne change pas alors Monsieur Platini est le probable gagnant. »

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Vice-président de la FIFA et membre de son comité exécutif depuis 2002, Michel Platini est effectivement décrit, par ses détracteurs, comme l’un des principaux artisans du « règne blattérien ». N’avait-il pas noué une alliance avec le Valaisan, en janvier 1998, apportant son soutien à ce dernier dans la course à la succession du Brésilien Joao Havelange, patron autocrate de la FIFA durant un quart de siècle (1974-1998) ? Après l’intronisation du Suisse, n’était-il pas devenu son zélé « conseiller football » ? En janvier 2007, n’avait-il pas bénéficié de l’appui de l’Helvète pour damer le pion au Suédois Lennart Johansson, puissant patron de l’UEFA depuis 1990 ?

Sous les coups de Blatter ?

Michel Platini et Sepp Blatter le 29 mai à Zurich.

« Trop, c’est trop. L’image est mauvaise. On ne peut plus continuer comme ça », avait soupiré Michel Platini, le 28 mai. Signe que la guerre était déclarée entre « Sepp » et son ancien allié. « Je pardonne mais je n’oublie pas », avait glissé le président de la FIFA à la Radio-Télévision Suisse, au lendemain de sa réélection. En initiant une batterie de réformes (limitation des mandats, vérification poussée de la probité des membres du Comité exécutif, divulgation des rémunérations individuelles) avant son départ, le natif de Viège va-t-il tout entreprendre pour entraver la marche triomphale de son ex-poulain ?

« Il prépare le terrain pour son successeur désigné », analyse un responsable de l’UEFA. « On a le sentiment que Blatter tente de gagner du temps pour poursuivre son entreprise de démolition, décrypte un proche de Platini. C’est son dernier combat, sa seule ambition : tout faire pour que Michel ne soit pas élu et lui savonner la planche. Il lui voue une haine farouche. » « Je souhaite bonne chance à tous les candidats y compris Michel Platini », avait ironiquement souri le septuagénaire, le 20 juillet.

Le roué valaisan n’a-t-il pas commencé à envoyer des bombes incendiaires dans le jardin de « Platoche » ? Début juillet, le patron du foot mondial a notamment visé indirectement Michel Platini, en chargeant nommément l’ex-président français Nicolas Sarkozy. Dans un entretien au journal allemand Welt am Sonntag, le président de la FIFA avait accusé la France et l’Allemagne d’être intervenues politiquement avant le vote d’attribution, le 2 décembre 2010, des Mondiaux 2018 et 2022, respectivement à la Russie et au Qatar.

« MM. Sarkozy et Wulff (alors son homologue allemand) ont essayé d’influencer le vote de leur représentant [le patron de l’UEFA, Michel Platini, et l’ex-icône allemande Franz Beckenbauer]. C’est pourquoi nous avons maintenant une Coupe du monde au Qatar », avait avancé l’Helvète. « Ceux qui […] ont décidé [de confier l’organisation du Mondial au Qatar] doivent prendre leurs responsabilités pour cela », insistait le Suisse, qui disait avoir été contraint « d’accepter » le vote de 14 des 22 membres du comité exécutif de la FIFA en faveur de l’émirat.

Le « Qatargate »

Joseph Blatter faisait ainsi allusion à un déjeuner organisé à l’Elysée le 23 novembre 2010, soit dix jours avant l’attribution du Mondial 2022 au richissime émirat, par Nicolas Sarkozy. Ce jour-là, l’émir du Qatar, Al-Thani, et son premier ministre, ainsi que Sébastien Bazin, représentant de Colony Capital, alors propriétaire du Paris-Saint-Germain, et Michel Platini étaient réunis autour de la table du président français.

Planifiée six mois avant le rachat du PSG par le fonds d’investissement qatari QSI (le président du PSG, Nasser Al-Khelaïfi, est un proche de Nicolas Sarkozy), cette réunion alimente depuis les suspicions de conflit d’intérêts. D’autant que Michel Platini a reconnu avoir voté en faveur du Qatar lors de l’attribution du Mondial 2022, le 2 décembre 2010, à Zurich. A posteriori, Blatter avait estimé que le choix de confier l’organisation du tournoi planétaire à l’émirat gazier avait été une « erreur ».

Le 3 juin 2014, le journal The Daily Telegraph, relatait que Michel Platini avait rencontré « en secret » le qatari Ben Hammam, l’ex-patron de la Confédération asiatique de football et ancien vice-président de la FIFA, accusé par le Sunday Times d’avoir versé plus de 5 millions de dollars (3,7 millions d’euros) de pots-de-vin à des membres de la FIFA. Le quotidien britannique faisait état d’un petit déjeuner pris en commun par les deux dirigeants en novembre 2010, quelques jours avant le vote d’attribution du Mondial 2022 au Qatar. Le patron de l’UEFA se trouvait directement visé, alors que son fils, Laurent, dirige en France Burrda Sports, l’équipementier sportif du Qatar.

« Bon courage »

Adulé dans l’Hexagone, soutenu par l’Elysée et Matignon, Michel Platini se lance désormais dans la bataille la plus âpre de sa carrière. Car cette campagne s’apparente à la dernière étape de son ascension politique. L’ultime marche à gravir. Alors que le chemin qui mène à la fonction suprême semble déjà bien défriché, le coprésident du comité d’organisation (CFO) du Mondial 1998 devra s’atteler à de lourds chantiers s’il devient le troisième français à prendre les rênes de la FIFA – après Robert Guérin (1904-1906) et Jules Rimet (1920-1954).

« Il aura à gérer le processus d’attribution du Mondial 2026 [actuellement suspendu], qui est désormais l’apanage du congrès. Il devra également collaborer avec les autorités judiciaires suisses et américaines qui mènent leurs investigations sur les affaires à la FIFA, détaille un connaisseur des arcanes de la Fédération internationale. Il lui faudra parler avec toutes les confédérations et faire de la politique comme Blatter, aller serrer des mains en Afrique… Et il devra évoluer dans un cadre institutionnel déjà défini par son prédécesseur. Je lui souhaitebon courage”. »

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