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Corée du Sud : arrestation du capitaine du ferry naufragé

Le terrible naufrage, mercredi, du ferry sud-coréen « Sewol » a causé la mort de 28 passagers, mais 278 personnes restent encore disparues. Le capitaine du navire a été arrêté.

Le Monde

Publié le 18 avril 2014 à 18h06, modifié le 19 avril 2014 à 07h28

Temps de Lecture 5 min.

Rassemblement en hommage aux disparus du ferry naufragé en Corée du Sud, le 17 avril.

Le terrible naufrage mercredi 16 avril du ferry sud-coréen Sewol a causé la mort de 28 passagers, mais 278 personnes sont encore portées disparues. Le pays est sous le choc après ce drame qui a touché majoritairement des enfants. Le directeur adjoint du lycée, qui avait survécu au naufrage, s'est suicidé vendredi sur l'île de Jindo où sont réunies les familles des victimes. Plus de quarante-huit heures après le naufrage, l'incompréhension des Sud-Coréens laisse place aux interrogations sur l'accident.

  • Les circonstances du naufrage

Le ferry a quitté Incheon mercredi matin pour l'île de Jeju, avec à son bord 475 personnes, dont 362 lycéens en voyage scolaire. A 9 heures, alors qu'il n'était qu'à une vingtaine de kilomètres des côtes, le navire s'est brusquement arrêté après un choc, et s'est renversé complètement deux heures plus tard. Le bilan fait actuellement état de 28 morts, retrouvés à la surface de l'eau.

L'origine de l'accident n'est pas encore connue. Plusieurs rescapés affirment avoir entendu un grand bruit avant que le Sewol s'immobilise. Trois pistes sont pour l'instant avancées :

1. Une erreur de navigation, ayant causé un choc avec le sol ou un objet immergé.

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2. Un problème de cargaison : il est possible que les 150 voitures présentes dans les cales du bateau se soient déplacées, ce qui aurait brutalement déséquilibré le bateau.

3. Un problème structurel du Sewol, qui circulait depuis vingt ans.

  • Une opération de sauvetage difficile

Cent soixante-douze personnes ont été sauvées, mais 278 personnes restent encore portées disparues, dont la moitié de l'équipage, constituée de 20 personnes. L'opération de sauvetage est ardue : la météo ne cesse de se dégrader, et des courants violents entravent l'activité des 500 plongeurs sur les lieux, qui peinent à s'approcher du bateau, complètement immergé.

Seuls deux plongeurs avaient réussi à pénétrer dans l'épave vendredi vers 19 heures, heure locale, mais ils n'avaient rien pu y distinguer. « Il n'y a quasiment aucune visibilité. Vous ne pouvez pas voir votre main devant votre figure », a dit un des deux hommes une fois revenu à terre.

Toutes les autres équipes ont été bloquées par les courants. « Nos hommes ne peuvent que toucher la coque avec leurs mains », a détaillé un plongeur aux familles des victimes. A défaut d'entrer dans le Sewol, deux plongeurs ont injecté de l'oxygène à l'intérieur du bateau, dans l'espoir que certains rescapés survivent grâce à ces poches d'air. Plus les heures passent, plus l'oxygène se raréfie et la probabilité de retrouver des survivants s'amenuise rapidement.

Trois grues flottantes géantes sont arrivées sur les lieux, mais elles ne commenceront le relèvement de l'épave qu'une fois tout espoir perdu de retrouver des survivants, ont précisé les gardes-côtes.

  • Les autorités sud-coréennes taxées d'« incompétence »

Plusieurs parents angoissés ont reçu des messages de leurs enfants après le naufrage du bateau, des appels au secours où ils précisent s'être réfugiés dans les plus grandes pièces et attendre de l'aide. Les familles des victimes interpellent directement les autorités dans les médias en les accusant d'incompétence. « J'en appelle à tous. Est-ce ainsi que les choses se passent en Corée du Sud ? Nous vous supplions une fois de plus, je vous en prie, sauvez nos enfants », implore un père de famille.

Les pouvoirs publics affirment avoir déployé 500 plongeurs, 169 bateaux et 29 aéronefs sur les lieux du naufrage, des effectifs que conteste le père d'une des victimes, qui s'est rendu sur place avec les secours. Dans une allocution retransmise en direct à la télévision sud-coréenne jeudi 17 avril au soir, il affirme que « le gouvernement a menti » et précise n'avoir observé que quelques plongeurs et embarcations.

  • Le capitaine arrêté, un mandat d'arrêt contre deux autres membres de l'équipage

D'après les rescapés, l'équipage a intimé aux passagers de rester immobiles dans leurs cabines, alors que le bateau s'inclinait dangereusement. La plupart des lycéens ont obéi avec discipline, mais se sont rapidement retrouvés prisonniers, le sol glissant et incliné les empêchant de sortir des cabines. Les personnes secourues saines et sauves sont celles qui ont fui les cabines et ont pu sauter par-dessus bord avant que le bateau se retourne complètement.

Contrairement aux ordres qu'ils avaient donnés aux passagers, des membres de l'équipage ont fui le Sewol rapidement. Les familles des victimes ont porté plainte contre le capitaine, un des premiers à avoir quitté le navire : « Comment a-t-il pu demander aux enfants de rester à bord et sauter du bateau alors qu'il était en train de couler ? », s'interroge un parent.

Pour se justifier, le capitaine a expliqué samedi :

« A ce moment-là [pendant les 40 minutes après le choc], les bateaux de secours n'étaient pas arrivés. Il n'y avait pas non plus de bateaux de pêches, ou d'autres embarcations pour aider. Les courants étaient violents et l'eau était très froide dans cette zone. J'ai pensé que les passagers seraient emportés et se trouveraient en difficulté s'ils évacuaient dans le désordre, sans gilet de sauvetage. Et ça aurait été la même chose avec un gilet de sauvetage. »

Le capitaine du ferry a été arrêté samedi matin (heure locale), selon l'agence nationale Yonhap. Lee Joon-Seok fait face à cinq accusations, dont celle de négligence et de violation du droit de la mer, précise l'agence. Son subalterne, ainsi qu'un troisième membre de l'équipage, eux aussi réchappés du naufrage, sont sous le coup d'un mandat d'arrêt par les procureurs sud-coréens.

Les enquêteurs ont révélé que le capitaine n'était pas à son poste au moment du choc, ayant laissé son subalterne à la barre. Agé de 69 ans, le capitaine Lee Jon-seok avait l'habitude d'effectuer le trajet Incheon-Jeju depuis vingt ans, d'après la compagnie maritime du navire.

  • La Corée du Sud en deuil

Le pays respecte un deuil national depuis mercredi. Toutes les célébrations festives ont été annulées, les émissions de divertissement remplacées par des images du drame sur les chaînes de télévision. « Ce n'est pas un moment pour les rires et la joie. Nous voulons porter le deuil des victimes et maintenir une atmosphère aussi sombre que possible », détaille le producteur de KBS, une des principales chaînes de télévision du pays.

Les deux principaux partis politiques – Saenuri, le parti conservateur et le Parti démocrate unifié – ont également imposé une suspension de la campagne pour les élections régionales et municipales prévues pour juin. La quatrième puissance asiatique est profondément choquée, et les internautes expriment leur colère et leur désarroi les réseaux sociaux : « Quel est l'intérêt d'avoir l'internet le plus rapide du monde, les smartphones les plus cool, les meilleurs chantiers navals, lorsqu'on n'est pas capables de sauver nos enfants ? », interroge un internaute sur Naver.com, un portail très populaire. « Je pensais que notre pays était plus développé que l'Indonésie ou le Bangladesh. J'avais peut-être tort », renchérit un autre.

Marine Messina

Le Monde

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