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Etats-Unis : 2 heures d'agonie pour un condamné à mort

Le produit létal injecté a mis beaucoup plus de temps que prévu pour agir, suscitant la colère des avocats de Joseph Wood.

Le Monde avec AP, AFP et Reuters

Publié le 24 juillet 2014 à 01h48, modifié le 24 juillet 2014 à 10h44

Temps de Lecture 4 min.

Le point sur la peine de mort aux Etats-Unis.

Joseph Wood, condamné à mort dans l'Etat d'Arizona, a succombé plus de deux heures après l'injection du produit létal censé le tuer, mercredi 23 juillet, une durée anormalement longue dénoncée par ses avocats et pendant laquelle il aurait donné plusieurs signes de vie.

L'homme avait été condamné pour les meurtres en 1989 de son ex-petite amie et du père de celle-ci. Il a été officiellement déclaré mort à 15 h 49, alors que la procédure d'injection avait commencé à 13 h 52, selon le procureur général de l'Arizona.

Les avocats du condamné estiment qu'une injection efficace de barbituriques aurait dû le tuer en à peine 10 minutes environ. Alors que Joseph Wood était encore vivant, ils ont lancé un recours en urgence devant la justice fédérale pour faire arrêter l'exécution et demander que lui soit administré un traitement médical permettant de le sauver.

Le document explique :

« A 13 h 57, les autorités pénitentiaires ont rapporté que M. Wood était anesthésié, mais à 14 h 02, il a commencé à respirer. A 14 h 03, sa bouche a bougé et il continue à respirer depuis lors. Il halète et grogne depuis plus d'une heure ».

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Wood a ensuite été déclaré mort avant qu'une réponse ne parvienne aux avocats. « Cette exécution a violé le droit de M. Wood d'être exécuté sans cruauté, conformément au huitième amendement  » de la Constitution américain, déclarent-ils dans le Guardian. « L'Arizona semble avoir rejoint plusieurs autres Etats irresponsables dans une horreur qui était absolument prévisible », poursuit l'un d'eux dans un communiqué.

« ON POUVAIT ENTENDRE WOOD RESPIRER LOURDEMENT »

Joseph Wood, exécuté le 23 juillet.

Un journaliste de l'agence Associated Press, présent pour assister à l'exécution, a détaillé :

« Les yeux de Wood se sont fermés [après l'injection à 13 h 52]. Environ dix minutes plus tard, ses hoquets ont commencé. Sa machoire s'est ouverte, sa poitrine a gonflé, puis il laissé échapper un soupir. (...) Ces soupirs se sont répétés des centaines de fois. Un membre de l'administration pénitentiaire est allé le contrôler une demi-douzaine de fois.

On pouvait entendre Wood respirer lourdement quand un officiel a allumé le micro afin d'informer les spectateurs de la scène qu'il était sous l'effet des produits. [...] L'exécution a mis 1 heure et 57 minutes pour parvenir à son terme, et les halètements de Wood ont duré pendant un peu plus d'une heure et demie. »

La gouverneur d'Arizona, Jan Brewer, a ordonné une enquête sur le déroulement des faits, tout se disant persuadée que le condamné était « mort d'une manière ne contrevenant pas à la loi américaine, sous les yeux de témoins et d'un personnel médical qui assurent qu'il n'a pas souffert ».

Elle a ajouté que la comparaison ne pouvait être faite avec « la souffrance horrible et brutale que [Joseph Wood] avait fait endurer à ses deux victimes – et la souffrance à vie qu'ont éprouvée leurs familles ».

DE MULTIPLES RECOURS

Cette exécution ratée a eu lieu alors qu'une polémique entoure depuis plusieurs mois les procédures par injection de produits létaux aux Etats-Unis. En avril, le condamné à mort Clayton Lockett, dans l'Oklahoma, s'était remis à bouger et à parler plus de 30 minutes après avoir été empoisonné par les autorités, et avait été déclaré mort au terme « de douleurs atroces ». L'Etat avait ensuite instauré un moratoire de six mois.

Au cours des 24 heures précédant son exécution, Joseph Wood avait déjà déposé plusieurs recours et contesté jusque devant la Cour suprême le voile du secret qui entoure la procédure en Arizona. En l'absence d'informations sur les produits utilisés et sur les qualifications des personnels chargés de les injecter, il avait dénoncé les risques de souffrance liés à son exécution.

Les autorités locales s'étaient contentées de répondre que M. Wood serait exécuté avec les mêmes produits utilisés lors d'une autre exécution controversée qui avait eu lieu en janvier dans l'Etat de l'Ohio, au cours de laquelle le condamné s'était agité et avait gémi pendant 26 minutes. Les autorités de l'Ohio avaient, en l'occurrence, utilisé un mélange d'anesthésiant midazolam et d'hydromorphone, un dérivé de la morphine. 

« NOUS NE POUVONS PAS CONTINUER À TORTURER »

« Les Américains en ont marre de cette barbarie », a déploré Diann Rust-Tierney, de la Coalition nationale pour abolir la peine de mort, selon qui les Etats-Unis sont « tout simplement incapables de mettre en œuvre la peine capitale de manière humaine ». « C'est l'indication claire qu'il faut changer les choses au plus haut niveau », a réagi pour sa part le directeur du Centre d'information sur la peine capitale :

« Les Etats ne sont absolument pas prêts à utiliser l'injection létale avec de nouveaux produits, cela doit s'arrêter. Nous ne pouvons pas continuer à torturer, à mettre les gens sur une table d'exécution pendant deux heures et à espérer qu'ils meurent. »

L'année 2013 a été pour la peine de mort aux Etats-Unis une année de déclin, marquée par des exécutions et des condamnations à des niveaux parmi les plus bas depuis des décennies. Selon un rapport annuel du Centre d'information sur la peine de mort (DPIC), 39 condamnés à mort ont été exécutés en 2013 aux Etats-Unis, contre 43 en 2012. Depuis 1999 – année record, avec 98 exécutions – ce chiffre a décru de 60 %.

Le Monde avec AP, AFP et Reuters

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