Chronique. Aux Jeux olympiques d’hiver de Pyeongcheang, en Corée du Sud, l’homme qui prend le plus de risques s’appelle Moon Jae-in. Ce n’est ni un descendeur fou ni une vedette du slalom géant, encore moins un artiste du snowboard. Moon Jae-in est le président sud-coréen. Il a parié gros sur ces JO : en faire le tremplin d’un début de détente entre les deux parties de la péninsule coréenne, un des endroits les plus explosifs de la planète.
Dès son arrivée au pouvoir, en mai 2017, le président a lancé des appels à la reprise d’un dialogue avec le Nord – la République populaire et démocratique de Corée (RPDC). Premier succès : le fantasque, mais rationnel, dictateur nord-coréen, Kim Jong-un, a répondu positivement. La Corée du Nord a envoyé une équipe aux JO, qui, sous la bannière bleu et blanc de la réunification, a défilé avec celle de Corée du Sud (comme en 2000, 2004 et 2006). Kim Jong-un a aussi dépêché sa sœur aux Jeux, Kim Yo-jong, 30 ans.
Poids lourd du régime de la RPDC, la jeune femme a été reçue à la présidence sud-coréenne, le 10 février à Séoul. Elle a transmis à Moon Jae-in une invitation à se rendre en visite officielle en Corée du Nord. A son tour, le président sud-coréen devrait dire oui et aller à Pyongyang, à une date non encore fixée, pour une rencontre au sommet avec Kim Jong-un. Tout va mieux ?
Il y a quelques semaines, Donald Trump, « twitterman », et celui qu’il appelle « rocketman », le président Kim, échangeaient des menaces guerrières et des considérations de cour de récréation sur la taille de leur « bouton nucléaire » respectif. Fin octobre 2017, la Maison Blanche rappelait sa position : les Etats-Unis ne toléreront pas que Pyongyang dispose de l’arme nucléaire ; ils n’entendent pas « dissuader et contenir » une Corée du Nord nucléaire ; ils veulent qu’elle démantèle son programme « avant qu’il ne soit trop tard » ; « le temps est compté », dit-on au Conseil national de sécurité. Richard Haass, le respecté et pondéré président du Council on Foreign Relations, le Vatican des centres de réflexion stratégiques américains, avait alors commenté :
« Nous sommes plus près d’entrer en guerre qu’on ne l’imagine. »
Condition préalable
Le président Moon prend des risques. L’opinion sud-coréenne n’est pas enthousiaste. Les précédentes périodes de détente avec le Nord n’ont jamais longtemps altéré l’agressivité du régime de Pyongyang. Séoul offre à Kim Jong-un un moment de répit diplomatique avant la moindre concession de sa part. Celui-ci gagne du temps. Il veut améliorer son image au moment où les Etats-Unis s’apprêtent à bétonner encore l’embargo à l’encontre de la RPDC.
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