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Téléphonie mobile : les opérateurs débloquent 3 à 4 milliards d’euros pour supprimer les « zones blanches »

Les opérateurs ont conclu un accord avec le gouvernement pour couvrir la France et ainsi permettre de généraliser la 4G à l’ensemble de la population.

Par  (avec AFP)

Publié le 14 janvier 2018 à 12h11, modifié le 15 janvier 2018 à 11h56

Temps de Lecture 5 min.

Julien Denormandie, secrétaire d’Etat auprès du ministre de la cohésion des territoires, le 22 novembre 2017.

Un miracle. Au terme de six mois d’âpres négociations, le gouvernement est parvenu à mettre d’accord Orange, SFR, Free [dont Xavier Niel, le fondateur, est actionnaire à titre individuel du Monde] et Bouygues Telecom, aux intérêts souvent divergents. Les quatre opérateurs ont signé le plan du gouvernement sur la couverture mobile, qui va permettre de l’améliorer et de généraliser la 4G à l’ensemble de la population. « C’est un accord historique. Aujourd’hui, beaucoup trop de villages sont mal ou non couverts. Les opérateurs vont investir massivement dans ces zones-là. En trois ans, nous allons faire ce que nous avons fait par le passé en quinze ans », se félicite Julien Denormandie, le secrétaire d’Etat à la cohésion des territoires.

D’ici à 2020, date à laquelle Emmanuel Macron avait promis un accès au « bon débit » Internet pour tous fixes et mobiles, la totalité du plan sera lancé, même s’il ne sera pas entièrement achevé. Sa partie la plus importante va consister à couvrir les « zones blanches », ces hameaux ou villages qui n’ont pas du tout accès à la téléphonie mobile. La définition même de zone blanche sera élargie afin de permettre aux élus qui estiment leur commune mal couverte d’entrer dans cette catégorie. Un millier de villages, contre 500 aujourd’hui, devraient y figurer.

Deuxième étage de la fusée, « 10 000 communes qui sont en 2G ou en 3G seront converties à la 4G », complète le secrétaire d’Etat. Enfin, « les opérateurs accéléreront la couverture des axes routiers et ferroviaires », affirme M. Denormandie. A l’intérieur des bâtiments, la couverture sera également améliorée. « Nous allons obliger les opérateurs à faire des offres de voix sur Wi-Fi. Tous ceux qui auront Internet pourront téléphoner », indique Sébastien Soriano, le président de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep), qui a mené les négociations avec les opérateurs.

Pour répondre aux attentes du gouvernement, les opérateurs ont accepté d’investir entre 3 et 4 milliards d’euros d’ici cinq ans. Un montant qui vient s’ajouter aux 8,9 milliards d’euros qu’ils avaient injecté, en 2016, dans leurs réseaux.

« C’est un changement de paradigme »

En échange, le gouvernement a accepté un sacrifice de taille : il a renoncé aux enchères financières qui accompagnent l’attribution des fréquences de téléphonie mobile, et va donc se priver d’une manne financière importante. En 2015, le dernier appel d’offres avait rapporté 2,8 milliards d’euros à l’Etat. « C’est un changement de paradigme. Ces fréquences vont être mises au service du quotidien des Français », justifie M. Denormandie.

Cette fois, pour obtenir les précieux sésames, les opérateurs ne devront pas passer à la caisse, mais verront leurs obligations renforcées. « C’est ce qui rend le deal contraignant. Nous ne sommes plus dans les bonnes intentions », témoigne M. Denormandie. « L’investissement sera supérieur à ce qu’auraient rapporté les fréquences. Il ne s’agissait pas de faire un cadeau aux opérateurs », assure M. Soriano. De fait, le montant du chèque signé par les opérateurs était la clé pour convaincre Bercy de renoncer à cette manne.

Les opérateurs verront leurs licences actuelles prolongées de dix ans. En outre, le portefeuille de fréquences de Free, opérateur le moins bien loti car arrivé plus tard sur le marché, sera étoffé. Ce prolongement et cette réattribution, qui se concrétiseront ces prochains mois, sont délicats à mettre en place. Le spectre hertzien étant un bien public, une procédure d’attribution publique sera menée. L’Arcep ne devra pas donner l’impression que tout est joué d’avance.

Un accord donnant-donnant

« Il s’agira d’une procédure ouverte qui maximise l’aménagement du territoire », explique pudiquement M. Soriano, évitant soigneusement l’expression « négociation de gré à gré ». Ces incertitudes juridiques ont d’ailleurs contribué à ralentir les discussions. Les opérateurs voulaient être sûrs que le gouvernement soit capable de tenir ses promesses et de leur assurer la pérennité de leurs licences. « Nous serons heureux le jour où nous serons attributaires de nos fréquences », confirme un opérateur télécoms.

Les opérateurs applaudissent néanmoins le geste du gouvernement. « Pour la première fois, la puissance publique d’un grand pays européen renonce à des enchères pour mener un grand projet d’aménagement du territoire. Dans cinq ans, la France sera le pays le plus avancé en matière de digital », se félicite Maxime Lombardini, le directeur général de Free. « Nous proposions, sans l’obtenir, ce genre de mécanisme depuis longtemps. En six mois, ce gouvernement réussit à obtenir un accord alors que cela fait quinze ans qu’il y a des zones blanches », corrobore Didier Casas, directeur général adjoint de Bouygues Telecom. Et l’ancien conseiller régalien d’Emmanuel Macron qui l’a soutenu avant l’élection présidentielle d’expliquer que l’idée d’un accord donnant-donnant est née pendant la campagne. « Tout le monde s’y retrouve, et a priori, il n’y aura plus de zones blanches », ajoute Régis Turrini, le secrétaire général de SFR.

Mutualisation

Fait rare également, les opérateurs sont parvenus à signer la paix des braves. Pendant des mois, les discussions ont buté sur la manière dont se concrétiseraient les investissements et le nombre d’antennes qui seraient mutualisées, autrement dit partagées entre les opérateurs. Pour SFR, Bouygues Telecom et surtout Orange, qui dispose de la couverture la plus vaste, la mutualisation revient à faire la courte échelle à Free, qui doit parachever la construction de son réseau en particulier dans les milieux ruraux. « Orange a été très dur sur ce point-là », lâche un témoin.

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Dans un premier temps, l’Arcep avait d’ailleurs produit un plan comportant un très fort niveau de partage des antennes, s’attirant les foudres des concurrents de Free, Orange en tête. Au point, selon nos informations, de donner envie à l’opérateur historique d’outrepasser le régulateur et d’aller négocier en direct avec le gouvernement.

« A l’origine, le plan prévoyait que 10 000 et 12 000 antennes soient mutualisées, c’était énorme. Finalement on est plus autour de 6 000 à 7 000. C’est plus équilibré », dit un industriel. Quant à Bouygues Telecom, l’opérateur était particulièrement sensible à toute nouvelle sortie de cash supplémentaire. A l’arrivée, de bonne source, ses efforts seront lissés. Si tous sont contents, ils rappellent aussi l’effort produit. « Nous allons accélérer, mais pour certains, avec l’épée dans les reins. Tout le monde va souffrir », dit l’un d’eux.

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