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Réseaux sociaux : la pente glissante de l’indignation permanente

Pour les producteurs de contenus, sur Facebook, pousser le lecteur à s’indigner est devenu le moyen le plus sûr d’atteindre son public. Ce qui n’est pas sans risque pour la pratique journalistique, analyse le chef du pôle vidéo du « Monde » Olivier Clairouin.

Publié le 20 janvier 2018 à 08h36, modifié le 20 janvier 2018 à 11h32 Temps de Lecture 5 min.

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ANALYSE. Même s’il semble aujourd’hui moins les porter dans son cœur, Facebook a tout fait ces dernières années pour attirer les médias dans ses filets. Mise en avant des contenus vidéos, subventions massives pour produire des Facebook Live (vidéos en direct), « Instant articles » (un format spécial réservé aux médias)…

Objectif : donner à l’utilisateur tout ce dont il peut avoir besoin, dont des contenus d’actualité, pour qu’il ne quitte jamais la plate-forme. Résultat : en France, plus d’un tiers des personnes s’informent désormais en priorité sur les réseaux sociaux, et particulièrement sur Facebook. Ce qui a un impact très concret sur la manière dont les rédactions produisent leurs contenus.

Une grammaire adaptée à Facebook

Prenons l’exemple de la vidéo : interviews face caméra, déclaration ou image forte dans les trois premières secondes pour retenir l’attention, phrases courtes et percutantes incrustées directement dans l’image, musique rythmée et animations à gogo, formats de type édito en vertical

Les vidéos publiées en ligne n’ont, dans leur grammaire, plus rien à voir avec celles publiées il y a à peine deux ans. Inventé et codifié par les médias dont la stratégie économique repose entièrement sur les réseaux sociaux (ni NowThis, ni Brut n’ont de sites Internet), ce modèle a depuis été imité par l’intégralité des médias en ligne. Et, parfois, moqué pour son manque de profondeur :

Parce que leur morphologie s’est adaptée aux contraintes du réseau social, ces contenus sont incontestablement plus « efficaces » que leurs prédécesseurs pour capter l’attention de l’internaute. Mais ils incarnent aussi une nouvelle logique : celle qui vise en priorité à être liké, commenté et partagé directement sur le réseau social, davantage qu’à être lu sur un site tiers.

Or rien ne provoque mieux cet effet que l’indignation. Comme le relève Molly Crockett, professeure en psychologie à l’université Yale, l’indignation est le carburant de ces réseaux sociaux, qui « exacerbent la façon dont on [l’]exprime, en gonflant les stimulus déclencheurs, en réduisant son coût et en amplifiant les bénéfices personnels que l’on en tire ». En clair, s’indigner en ligne, c’est flatter son ego en collectionnant les likes et les cœurs.

Pour les producteurs de contenus, le plus infaillible est donc de parler de ce qui peut énerver le lecteur : « les clichés sexistes dans les pubs », les réactions à une énième ineptie de Donald Trump, les « énormités proférées dans les médias » par les signataires d’une tribune parue dans Le Monde, un montage larmoyant montrant les militants écologistes assassinés en 2017…

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