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« Le vote utile mine l’utilité même du vote »

Dans une tribune au « Monde », le politiste Rémi Lefebvre estime que le vote par défaut empêche le débat en fatalisant le probable entretenu par les enquêtes d’opinion.

Publié le 03 avril 2017 à 06h38, modifié le 03 avril 2017 à 15h17 Temps de Lecture 5 min.

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Collage d’affiches pour le candidat du PS Benoît Hamon à Quimper (Finistère) le 1er avril.

TRIBUNE. La petite musique insinuante du vote utile s’installe à gauche. A mesure que le premier tour approche et que le péril du Front national (FN) grandit, nul doute qu’elle va devenir assourdissante. Le vote utile est le pendant de la prophétie – partiellement auto-réalisatrice – du désastre annoncé de la gauche. Il prospère sur le récit ressassé à longueur de colonnes et de chiffres de la défaite inéluctable, le catastrophisme sondagier faisant foi.

Désorientés, les électeurs de gauche se raccrochent à la boussole des sondages et cèdent à un vote utile qui est multiple. Il pourrait inciter les électeurs socialistes à se tourner vers Jean-Luc Mélenchon dès lors que ce dernier conforte son avance à gauche, mais il les enjoint surtout à rejoindre Emmanuel Macron, candidat du moindre mal. Dans les deux cas, il plombe la candidature de Benoît Hamon. Le vote utile risque ainsi de faire, mais aussi de défaire, l’élection, si par là on entend la délibération raisonnée autour de projets.

« En fatalisant le probable, le vote utile tétanise le débat »

Parler du vote utile et l’analyser, c’est le faire exister et sans doute le consolider. S’il est entretenu par les enquêtes d’opinion, le vote par défaut s’impose aussi parce qu’il s’autoproduit : il empêche le débat politique, qui, seul, pourrait le conjurer. Les lignes ne peuvent plus bouger. En fatalisant le probable, il tétanise le débat. Produit d’une rhétorique anxiogène, le vote utile stérilise la confrontation politique autour des programmes, qui, seule, pourrait le dissoudre.

Il pèse enfin sur les soutiens. Il convient de « donner de la force » à Emmanuel Macron, selon la formule de Bertrand Delanoë. Les ralliés socialistes à Emmanuel Macron tirent prétexte du vote utile pour régler leurs comptes avec la gauche du parti. La (non-)campagne actuelle, polluée par les affaires et invertébrée, n’arrange rien… On verra si les débats télévisés bouleverseront la donne.

Recul du vote de conviction

Le vote utile a bien étendu son domaine au fil des ans. Une forme de socialisation politique nouvelle s’est développée ces dernières années, qui a « déshabitué » au vote de conviction, d’autant plus que la loyauté électorale aux organisations s’est largement érodée.

Il faut néanmoins le rappeler : le vote utile suppose une forte connaissance du jeu politique, qui est l’apanage des électeurs les plus politisés. Beaucoup d’électeurs de gauche ont voté pour Ségolène Royal dès le premier tour en 2007 pour conjurer un risque de « 21 avril ». François Hollande a profité de l’« antisarkozysme » en 2012. Xavier Bertrand ou Christian Estrosi ont été élus grâce aux voix de gauche pour faire barrage au FN lors des dernières élections régionales.

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