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Le peu d’appétence d’Edouard Philippe pour la transparence de la vie publique

Le premier ministre a reçu un « blâme » pour avoir refusé de se plier aux lois votées après le scandale Cahuzac, qui l’obligeaient à livrer des informations sur son patrimoine.

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Publié le 16 mai 2017 à 19h18, modifié le 17 mai 2017 à 09h40

Temps de Lecture 4 min.

Edouard Philippe lors de la passation des pouvoirs avec Bernard Cazeneuve à Matignon, lundi 15 mai.

C’est un premier ministre nouvellement nommé, dont les prochaines déclarations de patrimoine et d’intérêts, attendues dans deux mois au plus tard par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) – soit d’ici au 15 juillet – seront particulièrement scrutées.

De fait, Edouard Philippe, choisi par Emmanuel Macron pour incarner le renouveau politique à Matignon, s’est jusqu’à présent plié avec une mauvaise grâce assumée aux nouvelles règles de transparence s’imposant à 15 000 responsables publics, depuis l’adoption des lois du 11 octobre 2013 sous le gouvernement de Jean-Marc Ayrault.

Comme l’a révélé Mediapart le 12 mai, le député (Les Républicains) de Seine-Maritime, maire du Havre (Seine-Maritime) et ancien porte-parole d’Alain Juppé, fait partie des quelques parlementaires – vingt-trois sur un total de 1 048 déclarants, députés et sénateurs sortants et entrants – mis à l’index par l’autorité indépendante chargée de contrôler et de promouvoir la probité des responsables publics, à l’occasion de leurs toutes premières déclarations de patrimoine légales de 2014.

« Aucune idée » de la valeur de ses propriétés

Soumis alors à l’obligation de déclarer l’ensemble de ses biens immobiliers et de ses avoirs (comptes bancaires, actions, etc.), deux ans après sa prise de fonctions à l’Assemblée nationale, comme l’ensemble de ses pairs, l’élu avait dans un premier temps rendu à la HATVP une déclaration incomplète.

Il avait ainsi pris soin d’indiquer, à la main, sur le formulaire officiel de la HATVP, n’avoir « aucune idée » de la valeur de son appartement parisien, « aucune idée » non plus de celle de ses parts dans une résidence de Seine-Maritime et encore « aucune idée » de ce que pouvait bien valoir son dernier bien situé en Indre-et-Loire, précise Mediapart.

Une façon, visiblement, de redire sa réticence envers cette loi de transparence, adoptée dans la foulée de l’affaire Cahuzac, contre laquelle il avait voté lors de la séance publique du 17 septembre 2013, comme la plupart des députés UMP de l’époque.

Il avait même maintenu sa position dans un second temps, refusant de se plier à la loi et de répondre aux précisions demandées par la HATVP, et recevant alors une « appréciation », dans le jargon de la Haute Autorité, autrement dit une observation, prévue par la loi, et s’apparentant en fait à un blâme.

Prix d’achat des biens, indiqués parfois en francs

M. Philippe aurait toutefois fait figurer sur sa déclaration – consultable à la préfecture de Seine-Maritime, mais dont il est interdit de faire état, pour ceux qui l’ont personnellement consultée – les prix d’achat des biens, « parfois en francs ».

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Certes, constatant ces manquements, l’autorité de contrôle présidée par l’ancien haut magistrat Jean-Louis Nadal n’avait pas jugé bon d’activer l’article 40 du code de procédure pénale, en transmettant le dossier à la justice, comme elle l’avait fait alors, en 2015, pour d’autres parlementaires en situation d’infraction manifeste à la loi.

Du fait de l’existence, les concernant, d’un « doute sérieux quant à l’exhaustivité, l’exactitude et la sincérité de leurs déclarations de situation patrimoniale, du fait de la sous-évaluation manifeste de certains actifs et de l’omission de certains biens immobiliers », les cas de Josette Pons, Thierry Robert, Patrick Balkany, Bernard Brochand, Lucien Degauchy, Dominique Tian, Bruno Sido et Serge Dassault avaient été signalés au procureur financier de la République.

Agacement

Mais la décision de « blâmer » M. Philippe, en raison du caractère « inexact » de ses déclarations, n’avait rien d’anodin, de telles observations, publiques, étant censées pousser les responsables politiques à plus de transparence pour le futur.

De la même façon, le député avait refusé de dévoiler la plupart de ses revenus à la date de son élection comme député, et pour les cinq années précédentes, dans sa « déclaration d’intérêts et d’activités » également exigée par la loi des responsables publics, afin de prévenir d’éventuels conflits d’intérêts.

« Je ne suis pas certain de comprendre la question. Vous voulez connaître mon taux horaire au jour de l’élection ? Ma rémunération mensuelle moyenne ? Annuelle ? »

Il n’avait ainsi renseigné aucun montant en face de la mention « directeur des affaires publiques d’Areva (2007-2010) ». Surtout, il avait à nouveau laissé poindre son agacement, interpellant la HATVP au sujet de ses activités d’avocat exercées de 2011 à 2012 : « Je ne suis pas certain de comprendre la question, écrit-il dans cette déclaration pour sa part consultable librement sur Internet. Vous voulez connaître mon taux horaire au jour de l’élection ? Ma rémunération mensuelle moyenne ? Annuelle ? »

L’avertissement de la HATVP a-t-il fonctionné ? Selon l’entourage du nouveau locataire de Matignon, Edouard Philippe a corrigé le tir dans sa déclaration de fin de mandat de député, récemment transmise à l’instance – la loi imposant aux parlementaires de transmettre deux déclarations de patrimoine, l’une en début de mandat, l’autre en fin, afin de vérifier qu’ils ne se sont pas illégalement enrichis durant la période. Cette seconde déclaration est en cours de vérification à la Haute Autorité, avec l’ensemble des déclarations des députés sortants. Toutes devraient être publiées, d’un tenant, d’ici à la fin de l’année.

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