Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

Grève en cours à Air France : onze syndicats réclament une hausse des salaires de 6 %

La journée d’action, jeudi, doit réunir toutes les catégories de personnels. La direction de la compagnie prévoit d’assurer 75 % des vols.

Par 

Publié le 22 février 2018 à 00h59, modifié le 22 février 2018 à 14h56

Temps de Lecture 4 min.

Des avions de la compagnie Air France sur le tarmac de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle.

La direction d’Air France est inquiète. L’appel à la grève lancé par onze syndicats de la compagnie (SNPL, SPAF, SNPNC, UNSA-PNC, UNAC, CGT, FO, SUD, Alter, CFTC et SNGAF) est presque historique. « Du jamais-vu depuis 1993 », explique Sandrine Techer, secrétaire de section du Syndicat national du personnel navigant commercial (SNPNC).

La journée de grève, organisée jeudi 22 février, devait réunir toutes les catégories de personnels – des pilotes aux hôtesses, en passant par les non-navigants. La veille, la direction prévoyait d’assurer « 75 % de son programme de vols compte tenu d’un taux de grévistes estimé à 28 % pour cette journée ». Dans le détail, Air France a tenu à prévenir ses passagers que 85 % des vols court-courriers et 75 % des vols moyen-courriers seraient assurés, tandis que seule la moitié des vols long-courriers au départ de Paris serait maintenue.

Toutefois, ces chiffres pourraient être largement sous-estimés avant le démarrage effectif de la grève. En effet, l’intersyndicale aurait décidé de jouer avec les limites de la loi Diard, qui oblige les salariés grévistes à se déclarer quarante-huit heures avant le début du conflit.

Plutôt que de communiquer à la direction de la compagnie les déclarations au fur et à mesure de leur réception, comme lors des grèves précédentes, les syndicats ont tout adressé d’un bloc, au dernier moment, comme pour perturber le recours par la direction à des personnels non grévistes pour réorganiser ses opérations de vols.

Pour les syndicats, les chiffres fournis par la direction sont en deçà de la réalité. « Nous sentons que les gens vont se mobiliser massivement », voulait croire Mme Techer. Et cette fois, les syndicats réclament des augmentations de salaire.

Cette revendication est portée par les très bons résultats financiers enregistrés en 2017 par la compagnie aérienne, avec 590 millions d’euros de bénéfices. « Les salariés veulent leur part du gâteau », observe un ancien délégué syndical. Il rappelle que, depuis six ans, les personnels ont subi un blocage des salaires, des plans de départs à répétition et 10 000 suppressions de postes. L’intersyndicale réclame une hausse générale des rémunérations de 6 %. Très loin de la volonté de la direction.

« Aumône » qui ne passe pas

A l’issue des négociations annuelles obligatoires, celle-ci a fait ratifier une augmentation de 1 % par deux syndicats représentatifs, mais largement minoritaires : la CFE-CGC et la CFDT. Une « aumône » – aux dires des syndicats – qui ne passe pas.

Pour Sandrine Techer, le compte n’y est pas, car les 1 % seront accordés en deux temps : « + 0,6 % en avril et + 0,4 % en octobre, soit une hausse de seulement 0,55 % sur l’année. » « Pour la première fois depuis 2011, nous avons débloqué les grilles de rémunération », se défend Franck Terner, directeur général d’Air France.

Le Monde Guides d’achat
Gourdes réutilisables
Les meilleures gourdes pour remplacer les bouteilles jetables
Lire

Ce dernier a regretté, mercredi, « ce mouvement social ». Il serait, selon lui, « une mauvaise chose pour l’entreprise ». Surtout, le directeur général conteste le chiffrage des syndicats. A l’en croire, les salariés devraient toucher « entre 3 % et 4,5 % d’augmentation de leur rémunération cette année » en additionnant notamment les hausses de salaire individuelles, les promotions et l’intéressement versé par la compagnie. Un effort financier estimé à environ 200 millions d’euros.

Surtout, la direction juge « déraisonnables et irréalistes » les revendications des syndicats. Ce seraient 240 millions d’euros supplémentaires qui viendraient s’ajouter aux 200 millions déjà accordés par la compagnie aérienne. Soit près de 440 millions d’euros au total, qui pourraient largement écorner les 590 millions d’euros de bénéfices de l’an dernier. De surcroît, plaide M. Terner, la cagnotte dégagée par la compagnie en 2017 « est deux fois inférieure à celle de Lufthansa et trois fois inférieure à celle de British Airways », ses principales concurrentes en Europe.

Un calcul remis en cause par Philippe Evain, président du Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) d’Air France. Selon lui, la compagnie doit compter avec « 500 millions d’euros de taxes indues par rapport à ses concurrents ». Le président du SNPL a sorti sa calculette : « Au total, Air France doit supporter environ un milliard d’euros de charges extérieures (hors carburant et salaires) en plus par rapport à ses rivales. » Et « un milliard [d’euros] de différentiel par rapport à KLM, c’est monstrueux », tonne M. Evain. « Les salariés de la compagnie ont pris conscience que cela ne [pouvait] plus durer. »

« Le conflit va se durcir »

Pour l’heure, l’intersyndicale signale qu’elle ne mène « plus aucune discussion avec la direction ». Pourtant, M. Terner assure « continuer à dialoguer avec les organisations syndicales ». De son côté, le patron du SNPL en appelle « à la responsabilité du gouvernement. C’est à lui de dire à Air France de négocier. Le dialogue social doit reprendre ses droits. »

Sandrine Techer n’y croit guère. « La direction préfère peut-être se payer le coût d’une grève que de payer ses salariés », subodore la secrétaire de section SNPNC. Elle soupçonne Air France de vouloir mesurer « le degré de mobilisation des salariés », mais aussi de connaître « quelles catégories de personnel se mobiliseront le plus ». Une façon peut-être de fracturer une intersyndicale qui inquiète beaucoup la direction de la compagnie.

Faute de négociations avec la direction, les syndicats prévoient déjà de ne pas en rester là. « Ce n’est pas une journée de grève qui fera réfléchir la direction, malheureusement ! », déplore Mme Techer. Elle souligne qu’une « importante grève tournante est menée depuis un mois déjà au sein des activités de maintenance, sans résultats ».

Même son de cloche au SNPL. « Le conflit va se durcir », prévient déjà M. Evain. Il signale que les « pilotes sont solidaires des autres catégories de personnel pour le rattrapage de l’inflation, mais qu’ils ont aussi d’autres revendications catégorielles », qui demeurent insatisfaites.

Pour préparer l’avenir, les organisations qui composent l’intersyndicale ont prévu de se réunir, vendredi 23 février, afin de « décider de la suite à donner » à leur mouvement, fait savoir la secrétaire de section SNPNC. L’intersyndicale a aussi invité les salariés à un rassemblement, jeudi, devant le siège d’Air France, à Roissy.

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner

Voir les contributions

Réutiliser ce contenu

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.