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STX : le nouveau schéma de reprise élaboré par l’Etat

L’Elysée souhaite faire entrer les grands armateurs au capital des chantiers de Saint-Nazaire.

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Publié le 31 mai 2017 à 16h00, modifié le 01 juin 2017 à 10h38

Temps de Lecture 4 min.

Emmanuel Macron, président de la république, participe à l'inauguration du navire de croisière MSC Meraviglia aux chantiers navals de Saint-Nazaire, mercredi 31 mai 2017.

Ils ont topé sur le bateau même. En pleine visite du gigantesque paquebot Meraviglia tout juste achevé à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), Emmanuel Macron et les dirigeants de la compagnie de croisières MSC ont eu un aparté, mercredi 31 mai. Quelques minutes seulement, mais décisives pour l’avenir des derniers grands chantiers navals français, dont le Meraviglia est le dernier-né.

Les deux volets de l’accord négocié depuis quelques jours et scellé à bord ont été immédiatement dévoilés par le nouveau président de la République. D’une part, l’armateur suisse va bien faire fabriquer quatre navires supplémentaires à Saint-Nazaire, a-t-il annoncé devant la marée des ouvriers en bleu de travail. Ensuite, le tour de table financier négocié par François Hollande pour les chantiers va être « revu ». Cela doit permettre de faire entrer au capital MSC et l’autre grand client, Royal Caribbean Cruises, indiquent des sources concordantes, et, au-delà, de « garantir l’excellence du savoir-faire exceptionnel de Saint-Nazaire ».

« Devant cette cathédrale sur l’eau, je suis fier de ce que vous avez fait, fier de ce que vous montrez au reste du monde, le fait que nous sommes une puissance industrielle qui produit, qui fait, qui innove et continuera à le faire », a déclaré M. Macron aux ouvriers.

37 millions d’heures de travail pour les chantiers français

Sur place, le nouvel hôte de l’Elysée a aussi lancé le traditionnel jéroboam de champagne, qui s’est brisé comme prévu contre la coque. Un bon présage. En 2005, lors de l’inauguration du Costa Concordia, la bouteille avait résisté au choc. Six ans plus tard, il faisait naufrage…

La commande des nouveaux paquebots était en gestation de longue date. Devant le nombre grandissant de touristes séduits par les croisières, MSC avait, dès avril 2016, posé des options pour faire construire quatre paquebots de plus en France. Restait à confirmer la commande, en fonction de l’évolution du marché. C’est désormais le cas. Le contrat, évalué à 4,5 milliards d’euros, représente 37 millions d’heures de travail pour les chantiers français. Les navires, qui fonctionneront au gaz naturel liquéfié, devront être livrés entre 2022 et 2026. Saint-Nazaire dispose ainsi d’un carnet de commandes rempli pour presque dix ans.

Maria, une salariée qui s’est occupé de la sécurité incendie du Meraviglia, sourit sous son casque blanc : « Après avoir tout fait pour livrer le bateau en temps et en heure, l’adrénaline redescend à peine qu’une nouvelle commande est confirmée. Dix ans de travail assuré, c’est assez exceptionnel ! »

Nombreuses critiques contre l’italien Fincantieri

Le deuxième pan de l’accord passé avec MSC était beaucoup moins anticipé. Depuis des mois, la recomposition du capital des chantiers de Saint-Nazaire est suivie de près par les pouvoirs publics, après la faillite de l’actionnaire coréen, le conglomérat STX. Un seul candidat ayant remis une offre d’achat, l’italien Fincantieri, c’est cet industriel qui a été choisi par le tribunal de commerce de Séoul chargé du dossier. Mais la reprise du site français par son principal concurrent a soulevé nombre de critiques. Certains craignent que Fincantieri ne privilégie ses sites italiens au détriment de Saint-Nazaire, et ne transfère le précieux savoir-faire français en Chine, où il vient de nouer un partenariat.

En toute fin de mandat, François Hollande, Manuel Valls et leurs équipes avaient mis au point avec Fincantieri un compromis subtil. L’industriel italien avait accepté de ne détenir qu’une minorité de 48 %. Le clan transalpin aurait néanmoins obtenu le contrôle grâce à la présence d’une fondation privée italienne à vocation caritative, la Fondazione CR Trieste, à hauteur de 6 %. Le reste du capital devait être réparti entre l’Etat français (33 %) et l’entreprise publique DCNS.

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« J’ai entendu les préoccupations exprimées, a déclaré mercredi M. Macron. C’est pourquoi je souhaite que les équilibres de principe trouvés en avril 2017 puissent être revus. En aucun cas, il ne doit y avoir, en raison d’un actionnariat futur, des choix qui puissent privilégier un site contre un autre et fragiliser les emplois à Saint-Nazaire. »

Limiter le pouvoir de Fincantieri

Le nouveau président ne compte pas exclure Fincantieri et nationaliser STX France, en dépit de ce que suggèrent certains, notamment FO. « Je me félicite d’un rapprochement industriel entre STX France et Fincantieri, qui matérialise la force de l’Europe », a affirmé M. Macron.

Il aimerait néanmoins que le pouvoir de Fincantieri dans les ex-Chantiers de l’Atlantique soit plus limité que ce qui avait été négocié, afin de « préserver la souveraineté industrielle » tricolore.

Le projet, validé dans son principe par l’Elysée au cours des derniers jours, consiste à écarter la fondation italienne, considérée par beaucoup comme un faux nez de Fincantieri. A sa place entreraient MSC et Royal Caribbean Cruises, les deux principaux clients de Saint-Nazaire. Les deux compagnies pourraient détenir ensemble 10 % du capital. Inquiet des projets de Fincantieri, le duo avait plusieurs fois tenté ces derniers mois de monter un « plan B », sans succès jusqu’à présent.

Devant le fait accompli

Son entrée au capital permettrait de cantonner Fincantieri à un rôle d’opérateur industriel ne disposant que d’une grosse minorité. Et les armateurs auraient l’assurance que le nouvel actionnaire clé ne prendra pas de décision contre leurs intérêts.

Reste à faire admettre ce nouveau schéma aux Italiens. M. Macron a pris soin, mardi, d’informer le premier ministre Paolo Gentiloni, concerné au premier chef puisque Fincantieri est une entreprise publique. Mais la société elle-même a visiblement été mise devant le fait accompli. « Remettre en cause une décision longuement mûrie par le précédent gouvernement, et donner un rôle charnière aux clients, c’est bizarre, non ? », réagissait à chaud, mercredi, un proche de Fincantieri. La tâche s’annonce délicate pour le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, chargé par l’Elysée de négocier les futurs équilibres précis « avec l’ensemble des parties prenantes ».

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