Elle aura laissé des souvenirs – souvent cuisants – à ceux qui ont passé le bac après 2002. L’écriture d’invention, l’une des trois épreuves au choix au baccalauréat anticipé de français, pourrait disparaître avec la mise en place de la réforme du baccalauréat 2021. Lors de son audition devant la commission des affaires culturelles, mardi 20 février, Jean-Michel Blanquer a suggéré qu’il pourrait y avoir « deux sujets de dissertation » au lieu d’un, et un commentaire composé. Pour expliquer ce choix, le ministre de l’éducation a évoqué un « bilan mitigé » pour l’épreuve d’invention.
L’écriture d’invention est censée évaluer la capacité des élèves à produire une écriture créative après avoir analysé les procédés littéraires d’un texte. Il peut s’agir d’un pastiche, d’une réponse à une lettre, d’une oraison funèbre, d’un dialogue de théâtre, sur le modèle de ceux présentés dans le corpus. Lorsque l’élève doit écrire la « suite » d’un passage, le professeur note sa capacité à respecter le style et la situation d’énonciation. Des générations de correcteurs du baccalauréat se sont donc arraché les cheveux sur des textes aux antipodes de l’auteur pastiché, des dialogues de comédie ratés ou des oraisons funèbres dépourvues de lyrisme, quand les élèves ne faisaient pas carrément apparaître un avion dans le ciel de Robinson Crusoé. En somme, il ne faut pas s’y tromper : l’écriture d’invention a mauvaise presse depuis le départ.
Cette épreuve a la réputation d’être le choix de repli des élèves moyens puisque, en apparence du moins, elle ne demande pas la même maîtrise que les deux autres formats. Les statistiques du nombre d’élèves qui choisissent ce sujet n’existent pas, mais les professeurs de français s’accordent à dire que ce choix arrive en deuxième position, après le commentaire composé. La dissertation, que le ministre souhaite revaloriser, est largement délaissée. « L’élève scolaire classique choisira le commentaire, car l’impression qu’il va pouvoir restituer une méthode et des connaissances apprises en classe le rassure, résume Viviane Youx, présidente de l’Association française des enseignants de français (AFEF). Ceux qui n’aiment pas tellement le français et pensent s’en sortir à moindres frais, c’est vrai, choisissent l’invention. » De son côté, Fanny Capel, présidente de Sauvez les lettres et enseignante au lycée Paul-Eluard de Saint-Denis, déplore peu ou prou la même tendance : « Les élèves moyens ont tendance à choisir l’invention, alors que c’est l’exercice le plus difficile. »
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