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La chaîne russe RT prépare son lancement en France

Avec 20 millions d’euros de budget, RT France est un gros projet pour la maison mère, qui possède déjà une équipe au Royaume-Uni, une aux Etats-Unis et deux chaînes en arabe et espagnol gérées depuis Moscou.

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Publié le 16 octobre 2017 à 22h00, modifié le 27 octobre 2017 à 11h58

Temps de Lecture 4 min.

« C’est le challenge le plus difficile de ma carrière », a estimé Xenia Fedorova, la présidente de RT France, présente, lundi 16 octobre, au salon audiovisuel du Mipcom à Cannes (Alpes-Maritimes), où elle promouvait le lancement de la version francophone de la chaîne publique russe. La phrase fait référence à la difficulté de monter en quelques mois une chaîne d’information, dont la mise à l’antenne est espérée « avant Noël ». Mais constitue également une façon de se poser en victime d’une couverture médiatique jugée injuste.

Jusqu’à présent, RT France (version française de la chaîne russe Russia Today) a été présentée comme un instrument du soft power de la Russie de Vladimir Poutine. Emmanuel Macron a notamment accusé la chaîne et l’agence de presse en ligne Sputnik d’avoir répandu des « contre-vérités infamantes » à son sujet. Le président de la République faisait notamment référence aux rumeurs sur son homosexualité supposée, évoquées par un élu de droite dans un article de Sputnik.

Depuis, les deux médias se sont défendus de répandre des « fake news », s’estimant même victimes de désinformation. RT, chaîne d’information de format assez classique, a pris l’habitude de se présenter comme une « entité séparée » de Sputnik, à la ligne plus tabloïd et sulfureuse – même si Mme Fedorova reconnaît que Margarita Simonian est à la fois la rédactrice en chef de RT et de l’agence Rossia Segodnia, maison mère de Sputnik.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés SputnikNews et RT, instruments d’influence de la Russie en France

Aujourd’hui, RT s’affaire au lancement de sa version francophone. Celle-ci ne sera pas visible en France sur la télévision numérique terrestre (TNT), mais « probablement » sur les « box » de deux des quatre opérateurs télécoms, selon Mme Fedorova ; chez SFR et Free – dont le fondateur, Xavier Niel, est actionnaire à titre individuel du Monde –, une telle diffusion n’est toutefois pas prévue à ce stade.

RT compte beaucoup sur sa diffusion par l’intermédiaire du Web et aussi hors de France, notamment en Afrique francophone et au Maghreb. Avec 20 millions d’euros environ de budget de lancement (mais un budget annuel « moins élevé », selon Mme Fedorova), RT France est un gros projet pour le média russe, qui possède déjà une équipe, plus petite, installée au Royaume-Uni, une autre aux Etats-Unis et deux chaînes en arabe et en espagnol gérées depuis Moscou.

Cinquante journalistes

RT France dit avoir recruté quarante des cinquante journalistes de sa future équipe, qui comptera de 100 à 150 personnes au total. Pour l’instant, la chaîne n’a pas réussi à attirer de figure connue du journalisme. « Nous y avons pensé au début », reconnaît Mme Fedorova, tout en assurant que ce n’était pas une « nécessité ». Suggérée parmi les recrues potentielles, la journaliste Natacha Polony a, par exemple, été rencontrée avant l’été – « C’était surtout pour apprendre à se connaître, précise Mme Fedorova. Elle était occupée à d’autres projets. » Mais il y a « une chance » qu’un journaliste de renom rejoigne la chaîne, selon la dirigeante.

Pour épauler comme adjoint Mme Fedorova, également directrice de l’information, la chaîne a recruté Jean-Maurice Potier, ancien présentateur des week-ends de LCI, qui avait quitté la chaîne au début de 2017. La directrice des programmes est Nadia de Mourzitch, ancienne directrice adjointe des magazines de TF1 partie en 2010 fonder la société de conseil N Content. Le site Internet, actif depuis 2015, est dirigé par Jérôme Bonnet, passé par les titres satiriques L’Echo des savanes, Siné hebdo ou Zélium. Le reste de l’équipe est plus jeune.

RT France semble désormais mener une politique médiatique beaucoup plus ouverte qu’avant. « Nous n’avons jamais eu une politique de fermeture », rétorque Mme Fedorova, qui admet pourtant qu’avant son arrivée les demandes d’entretien passaient par le siège de RT à Moscou.

Surveillé de très près par le CSA

« Je pensais que le paysage médiatique français serait plus ouvert à la diversité », explique-t-elle. Cet été, et cette semaine au Mipcom, Mme Fedorova a répondu à de nombreux journalistes. La chaîne organise aussi une soirée mardi, à Cannes.

En mai a été recruté un responsable de la communication, Lorenzo Ricci, un ancien de l’agence Ogilvy, où il a notamment travaillé pour l’entreprise nucléaire russe Rosatom, « brièvement ». RT France prévoit bientôt une visite de son studio en construction dans ses nouveaux locaux, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine).

En revanche, Mme Fedorova – qui parle le français, mais moins bien que l’anglais – affirme ne pas avoir encore « eu le temps » de faire du lobbying auprès des institutions.

Emmanuel Gout, un cadre audiovisuel français passé par Canal+ et le groupe de la famille Berlusconi en Italie et bon connaisseur de la Russie, avait été recruté pour cela avant l’été, mais il est déjà reparti –, sa mission était « temporaire », assure Mme Fedorova. Partisan d’une « dédiabolisation » de RT par la transparence, celui-ci avait notamment contacté l’école de journalisme de Sciences Po pour y organiser un débat.

RT France se sait surveillée de très près par le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Celui-ci attend notamment le nom du futur remplaçant d’Hélène Carrère d’Encausse, qui s’est désistée comme membre du comité d’éthique de la chaîne. L’autorité souhaite que soient respectées les stipulations sur l’honnêteté de l’information inscrites dans la convention de la chaîne, renouvelable en 2020. « Nous nous plierons à toutes les règles », assure Mme Fedorova. Réponse à partir de décembre.

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