Les insomnies l’assaillent encore, sept ans après avoir déposé le bilan de sa micro-entreprise en peinture et décoration, derniers stigmates de sa longue bataille avec le régime social des indépendants (RSI). Peut-être finiront-elles par s’estomper après son passage devant le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) de Paris, au début d’octobre. Une convocation dont Loïc (le prénom a été modifié à sa demande) espère ressortir « quitte avec le RSI », enfin. Et avec dans les mains « ce putain de papier » qu’il s’échine à réclamer depuis des mois, prouvant qu’il a fini de payer les cotisations qu’il devait à son ancienne sécurité sociale. « C’est tout ce que je demande pour pouvoir enfin tourner la page », lâche l’ex-entrepreneur de 46 ans, aujourd’hui salarié d’un grand groupe de maîtrise d’ouvrage.
A l’heure où le gouvernement vient d’annoncer la fin du très décrié RSI pour l’adosser au régime général de la sécurité sociale des salariés, reconnaissant le « calvaire » qu’ont vécu des millions de petits commerçants, artisans, autoentrepreneurs et professions libérales, Loïc raconte sa mésaventure d’une voix posée. « Sans rancœur », assure-t-il en sirotant sa Leffe, regard doux derrière ses lunettes à la mode. Malgré ce qu’il a vécu, il veut croire que les choses sont en train de changer pour les indépendants. Que son histoire puisse servir à ne pas reproduire les mêmes erreurs, dit-il.
« Le coup fatal » de trois gros impayés
Son histoire, celle d’un artisan passionné qui croyait en son talent pour remettre au goût du jour une technique de peinture oubliée et qui, encouragé par ses proches, a décidé de monter son entreprise. C’était en 2005. « J’étais plein d’enthousiasme et un peu naïf », se souvient-il, avec le sourire amer de ceux qu’on ne reprendra plus. L’aventure aurait pu continuer s’il n’y avait pas eu ces trois gros impayés de « clients truands » : « Le coup fatal. »
L’ancien artisan regrette surtout que le RSI n’ait pas su le soutenir dans ce coup dur. « S’ils avaient cru à mon activité et tenté de trouver des solutions pour m’accompagner, le temps que je rebondisse, je n’aurais peut-être pas été contraint de déposer le bilan. » Il découvre au contraire « une machine qui broie », juge-t-il, et les méandres d’une administration « kafkaïenne ». « Ils ont accepté l’étalement de mes cotisations, mais avec une majoration. Le RSI faisait comme la banque, j’étais étranglé des deux côtés. »
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