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Yann LeCun, lauréat du prix Turing : « L’IA continue de faire des progrès fulgurants »

Haut placé chez Facebook, ce scientifique a reçu mercredi le prestigieux prix Turing, avec deux autres pionniers des réseaux de neurones artificiels.

Propos recueillis par 

Publié le 27 mars 2019 à 11h28, modifié le 27 mars 2019 à 11h42

Temps de Lecture 3 min.

Yann LeCun, en juin 2016.

Yann LeCun, directeur scientifique de l’intelligence artificielle (IA) chez Facebook et professeur à l’université de New York, a reçu, mercredi 27 mars, avec deux autres scientifiques, le prix Turing, récompense majeure en informatique. Il est le second Français, après Joseph Sifakis en 2007, à recevoir ce prix. Les deux autres lauréats, le Britannique Geoffrey Hinton et le Canadien Yoshua Bengio, sont comme lui des pionniers des réseaux de neurones artificiels, qui sont une méthode particulièrement efficace d’apprentissage automatique, connue sous le nom de deep learning.

Que représente ce prix pour vous ?

Yann LeCun : C’est évidemment un grand honneur et un grand plaisir de le recevoir, surtout avec deux lauréats que je connais depuis longtemps. Nous avions jusque-là reçu des prix séparés. Maintenant il faudra que je fasse plus attention à ce que je dis, car peut-être que les collègues n’oseront pas me dire que j’ai tort !

Cela a pris du temps pour vaincre le scepticisme autour de ces techniques du deep learning, mais je n’ai pas d’aigreur particulière. Je pensais d’ailleurs que cela irait plus vite. Mais la Cocotte-Minute s’est remplie d’idées et quand ça a explosé à partir de 2010, c’était comme une révolution. On a même été surpris de certains progrès fulgurants en traduction, reconnaissance de la parole, compréhension du langage naturel, reconnaissance d’images…

Cela va-t-il continuer ?

Il n’y aura pas d’« hiver » de l’IA comme il y en a eu précédemment, car toute une industrie se développe déjà avec beaucoup d’applications. Les réseaux de neurones ne vont pas disparaître. Le domaine continue même de faire des progrès fulgurants et ces techniques auront des effets positifs massifs, c’est certain, en santé par exemple.

Mais, pour l’avenir, il nous faut travailler sur de nouveaux paradigmes d’apprentissage, moins supervisés, moins gourmands en données, et plus proches des modes d’apprentissage humains. Peut-être que la recherche s’essoufflera si nous tardons dans les progrès vers ces objectifs, mais ce n’est pas le cas pour l’instant.

Ce domaine connaît de nombreux succès mais aussi des « dérapages » (accident de voiture autonome, compte Twitter automatique qui devient raciste, visage d’homme noir pris pour un singe…). Notamment chez Facebook, pour qui vous travaillez…

Je n’ai pas d’états d’âme à travailler pour Facebook, même si on peut avoir de la peine quand certaines choses sont loin d’être parfaites. On peut penser à la persistance pendant plusieurs minutes de la vidéo de l’attentat en Nouvelle-Zélande. Il est sûr qu’il faut de l’IA pour aider à la modération des contenus, mais cela prend du temps pour faire des systèmes qui fonctionnent bien.

Nous avons aussi été pris de court en 2016 par les faux comptes qui diffusent des publicités politiques. Pallier ce problème a été une priorité et c’était difficile à résoudre.

En tout cas, de l’intérieur, je peux dire qu’il n’y a pas d’intentions maléfiques et que les problèmes sont soit dus à des erreurs que nous corrigeons, soit à des choses imprévisibles.

Certains systèmes générant des images, des vidéos, des discours ou des textes qui semblent vrais sont apparus, faisant craindre la multiplication de fausses informations. Quelle serait la parade ?

Pour l’instant, on constate en fait qu’un œil exercé arrive à distinguer le vrai du faux. Un chercheur de Harvard, Alexander Rush, a aussi montré que les systèmes d’IA ont, en quelque sorte, en eux leur propre antidote. On peut s’en servir pour savoir si le contenu est véridique ou non.

Evidemment, ces systèmes vont s’améliorer, mais je reste optimiste car nous apprendrons à nous méfier et à vérifier les sources, ce que l’on devrait toujours faire d’ailleurs !

La forte présence des géants du numérique dans le développement de l’IA et dans la recherche est-elle un problème ?

Non, si la recherche qui est menée est ouverte et partagée. C’est le cas chez Facebook ou Google par exemple. Moins chez Amazon ou Apple, qui ont une culture du produit manufacturé, demandant plus de secret. Je considère que les recherches universitaires et privées sont complémentaires. A Paris, dans notre laboratoire, nous avons déjà une quinzaine d’étudiants en contrat Cifre [convention industrielle de formation par la recherche, associant une entreprise et une université], donc nous contribuons aussi à la formation des jeunes chercheurs.

Lire son portrait : Article réservé à nos abonnés Yann LeCun, l’intelligence en réseaux
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