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Air France lance une consultation auprès des salariés pour mettre un terme à la grève

Pour régler le conflit, qui a coûté 300 millions d’euros à l’entreprise, la direction va s’adresser directement aux 46 771 salariés, en passant outre l’intersyndicale.

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Publié le 26 avril 2018 à 10h31, modifié le 26 avril 2018 à 14h05

Temps de Lecture 4 min.

Semaine décisive pour Air France après déjà onze journées de grève. Pour tenter de mettre fin au conflit, qui a coûté près de 300 millions d’euros à l’entreprise, la direction a choisi de s’adresser directement aux 46 771 salariés de la compagnie aérienne. Sans attendre les résultats de cette consultation ni ceux de l’intersyndicale, trois syndicats de pilotes (SNPL, SPAF et Alter) ont appelé, mercredi 25 avril, à quatre jours de grève supplémentaires, les 3, 4, 7 et 8 mai.

La consultation voulue par la direction a débuté jeudi 26 avril à 10 heures et s’achève vendredi 4 mai à 18 heures. Les personnels, rassemblés en un collège unique, sont invités à répondre à la question suivante : « Pour permettre une issue positive au conflit en cours, êtes-vous favorable à l’accord salarial proposé le 16 avril 2018 ? » Air France a mis sur la table une hausse des salaires de 7 % sur quatre ans, dont 2 % cette année. Mais cela reste loin de l’augmentation de 6 %, dès 2018, réclamée par les grévistes pour compenser l’inflation après six années de blocage salarial.

Lire (en Abonnés) : Article réservé à nos abonnés Air France : dialogue de sourds entre syndicats et direction

Avec cette consultation, l’idée de la direction est de passer outre l’intersyndicale qui réunit dix organisations représentant toutes les catégories de personnels, des salariés au sol aux pilotes en passant par les hôtesses et stewards. Jean-Marc Janaillac, PDG d’Air France-KLM, dont le premier ministre, Edouard Philippe, a jugé, jeudi sur Europe 1, « courageuse (…) la position face au conflit social », a un objectif clair : obtenir un oui franc et massif d’une large majorité des salariés de la compagnie. Le risque d’un désaveu paraît faible.

« Un coup de force », selon les syndicats

Selon les décomptes de la direction, les grévistes ont toujours été minoritaires chez Air France. L’organisation de ce scrutin devrait donc lui permettre de sortir de cette longue épreuve de force avec l’intersyndicale. Sans doute pour dramatiser l’enjeu de la consultation, M. Janaillac a mis sa démission dans la balance. « Si le résultat est négatif, je ne vois pas comment je pourrais rester à la tête d’Air France », a déclaré le PDG, le 20 avril.

De son côté, l’intersyndicale campe, pour l’instant, sur ses positions. « La mobilisation se poursuit », s’exclame Philippe Evain, président du Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL). L’intersyndicale devait se réunir, jeudi, pour « décider d’ajouter de nouvelles dates de grève », avait expliqué Sandrine Techer, secrétaire de section du Syndicat national du personnel navigant commercial (SNPNC), qui voit dans le référendum « un coup de force ». Mais les syndicats de pilotes ont grillé la politesse à l’intersyndicale.

Officiellement, les syndicats ne lâchent rien. « Les pilotes nous ont mandatés très largement pour obtenir une revalorisation de leurs salaires », affirme M. Evain. Il y a quelques semaines, à l’occasion d’une consultation auprès des adhérents du SNPL, « 71 % d’entre eux s’étaient déclarés favorables à une grève longue », pour obtenir 10 % d’augmentation, rappelle le président du SNPL qui rassemble 70 % des pilotes.

Partagés sur la poursuite du mouvement, les syndicats sont, en revanche, assez unanimes pour estimer que « la consultation ne réglera rien »

Toujours très remontée, la CGT feint d’ignorer la consultation voulue par la direction. « Le référendum, ce n’est pas notre sujet », se défend Karine Monségu, cosecrétaire générale de la CGT Air France. « Cela ne nous empêchera pas de continuer la grève », martèle-t-elle. Position tranchée ou posture ? Certains, parmi les syndicats, estiment qu’une large victoire du oui enlèverait beaucoup de légitimité aux grévistes. D’autres précisent, en privé, « qu’ajouter des jours de grève postérieurs au 4 mai est un peu prématuré ». Du côté d’Air France, on laisse entendre « qu’il ne s’agirait plus de faire grève contre la direction mais contre la majorité des salariés ».

Partagés sur la poursuite du mouvement, les syndicats sont, en revanche, assez unanimes pour estimer que « la consultation ne réglera rien ». Précédant l’entrée en vigueur du nouveau code du travail, elle n’aura, en effet, aucune valeur juridique. « Le référendum a été lancé un peu trop tôt car les ordonnances Macron ne s’appliquent qu’après le 1er-Mai », explique Ronald Noirot, délégué CFE-CGC. Si la consultation avait été organisée après cette date, « le résultat se serait imposé aux syndicats », déplore le délégué qui « appelle clairement à voter oui ». La consultation « ne changera strictement rien pour nous. Son résultat importe peu. Elle n’aura aucune influence sur l’arrêt du conflit », argue M. Evain.

Même un oui massif ne pourra permettre de valider l’accord salarial proposé par l’entreprise. « La direction devra rouvrir l’accord à la signature » des syndicats, déclare M. Evain. Une première étape avant de lancer « ensuite une autre consultation pour valider l’accord. Pendant ce temps-là, le conflit continue », signale le président du SNPL. A l’en croire, Air France ne peut pas espérer obtenir « un résultat avant le mois de juin ». Avec le risque que le coût de la grève, déjà exorbitant, s’envole vers des sommets.

« Une initiative perdant-perdant »

« Même si le oui l’emporte, ce sera une victoire à la Pyrrhus » pour la direction et « le ressentiment restera. Ce sera une initiative perdant-perdant », souligne M. Evain. Pour le président du SNPL, les pilotes sont incontournables et « la compagnie a besoin d’accords en permanence ». De fait, le feu vert des pilotes est impératif pour accroître le nombre d’avions de Transavia France, filiale à bas coût d’Air France, aujourd’hui limité à 40 appareils. La compagnie doit aussi négocier avec ses navigants la sortie de la flotte des vieux Airbus A340. La direction a également besoin d’instructeurs pour les nouveaux Boeing 787 qui commencent à être livrés.

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Faute d’obtenir une dérogation du SNPL, le premier Dreamliner devra être stationné à partir du 30 avril, car Air France n’aura pas d’instructeurs. « La direction a des rendez-vous avec ses pilotes. Elle a besoin d’un climat favorable. Sans leur aval, elle n’est pas capable de faire grand-chose dans une compagnie aérienne », admet M. Noirot. Inébranlable, M. Evain invite la direction à négocier : « Il est urgent d’avoir un dialogue social qui fonctionne. » Air France aurait-elle entendu le message ? Elle a déjà prévu un peu de grain à moudre sous forme notamment d’augmentation de salaires pour les commandants de bord.

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