Tribune. Depuis la journée de manifestation réussie des fonctionnaires le 22 mars, et surtout après les violences physiques très médiatisées survenues à la fac de droit de Montpellier à l’endroit d’étudiants protestataires, sans oublier les interventions policières sur plusieurs sites (Bordeaux, Dijon, Grenoble), on a assisté dans plusieurs universités à l’augmentation spectaculaire du nombre de personnes présentes dans les assemblées générales étudiantes (AG) : 1 000 étudiants à Paris-I-Tolbiac, 3 000 à Toulouse-Le Mirail, 1 000 à Nancy, 3 000 à Montpellier, 1 300 à Nantes.
Ces étudiants mobilisés réclament l’abrogation de la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (ORE), accusée d’instaurer la sélection à l’entrée de l’université publique, d’aggraver sa segmentation sociale par l’exclusion prévisible des bacheliers issus des filières professionnelles et technologiques, et par là même de remettre en cause « le service public de l’enseignement supérieur ouvert à tous les bacheliers ».
On a atteint ainsi dans ces universités des niveaux d’affluence qu’on n’avait plus vus depuis l’automne 2010, lorsque des dizaines de milliers d’étudiants et de lycéens s’étaient mobilisés aux côtés des salariés et des fonctionnaires contre la réforme remettant en cause l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans, et même, pour certains établissements, depuis 2009, à l’occasion de la mobilisation contre le décret sur le statut des enseignants-chercheurs, la formation des futurs enseignants, et la loi-cadre LRU, promulguée en août 2007, qui impose, depuis une décennie, un nouveau paradigme à l’université française.
« Grèves avec blocage »
Toutefois, ce ne sont encore que quelques universités sur les 73 concernées, au point que même les AG des universités de Limoges et de Tours, pourtant bloquées depuis le mardi 4 avril, n’ont pas réuni plus de 200 à 300 étudiants. Ainsi, si cette poussée, autant significative qu’inattendue, ne devrait nullement être traitée avec dédain par les décideurs politiques, il n’empêche qu’on est encore loin d’un déploiement de forces contestataires à l’échelle du territoire comparable aux mouvements étudiants antérieurs, que ce soit ceux de 2007 et de 2009, sans parler de ceux de 1986 et 2006.
Parallèlement, on a assisté à la multiplication des « grèves actives » se traduisant par la suspension des enseignements et l’occupation des locaux par les étudiants mobilisés, avec la mise en place de piquets à l’entrée des bâtiments, parfois soutenus par des membres du personnel enseignant, qui ont déjà fait savoir qu’ils refusaient de classer et de trier les dossiers des futurs étudiants. Ces « grèves avec blocage » concernaient, le vendredi 6 avril treize universités, bien que de façon différenciée.
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