Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

Abdelaziz Bouteflika : trop peu, trop tard

Editorial. Le président algérien assortit sa candidature à un cinquième mandat d’une concession : s’il est élu, il promet d’organiser une élection à laquelle il ne sera pas candidat. Mais pourquoi attendre ?

Publié le 04 mars 2019 à 11h41, modifié le 04 mars 2019 à 14h45 Temps de Lecture 2 min.

Editorial du « Monde ». C’est une première : dimanche 3 mars, le président Abdelaziz Bouteflika a publiquement reconnu la légitimité du vaste mouvement de protestation pacifique qui a déferlé dans les rues de plusieurs villes d’Algérie depuis le 22 février, et dont il a salué le « civisme ».

Dans une lettre diffusée par son directeur de campagne, après avoir confirmé sa candidature à un cinquième mandat, le chef de l’Etat algérien, dont les compatriotes ignorent même s’il se trouve en Algérie ou toujours hospitalisé en Suisse, s’est affirmé prêt à « assumer la responsabilité historique de la concrétisation de l’exigence fondamentale » des manifestants, « c’est-à-dire le changement du système ».

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Abdelaziz Bouteflika, candidat malgré tout

Pour un homme si accroché au pouvoir qu’à 82 ans il n’a toujours pas préparé sa succession, c’est un pas non négligeable : élu en 1999, le président envisageait de rester cinq ans de plus à la tête de son pays, malgré un état de santé qui l’a empêché de s’adresser directement aux Algériens depuis 2013. Mais M. Bouteflika veut gagner encore un peu de temps. Il a assorti ce geste d’une proposition : s’il est élu le 18 avril, il s’engage à convoquer une conférence nationale chargée de préparer une élection présidentielle anticipée, à laquelle, cette fois, il ne serait pas candidat. La concession, c’est qu’il n’y aura pas de sixième mandat Bouteflika.

La confiance est inexistante

C’est trop peu et c’est trop tard. Pourquoi, s’il est convaincu que les Algériens veulent « changer de système », ne pas alors organiser cette conférence nationale dès maintenant, en annonçant un report du scrutin du 18 avril ? Tout porte à croire que, paralysé depuis vingt ans, le régime ne sait pas comment remplacer M. Bouteflika et cherche à sauver ce qui peut encore l’être, en espérant organiser un processus de transition à sa main, parfaitement contrôlé.

Pour que la proposition de M. Bouteflika soit réalisable, il faudrait que les Algériens aient confiance dans sa volonté de la mener à bien. Ce qui se passe dans la rue, jour après jour, et même la nuit depuis dimanche soir, montre bien que cette confiance est inexistante. Aussi importante que la demande d’ouverture politique, une revendication des manifestants, en particulier, trahit cette fracture : la revendication de dignité, perceptible à travers tous ces témoignages qui évoquent « l’humiliation » imposée par un dirigeant inamovible, incapable de venir déposer sa candidature lui-même.

Les centaines de milliers d’Algériens descendus dans la rue l’ont fait jusqu’ici avec une remarquable retenue, en évitant tout débordement. La même retenue est notable du côté des forces de l’ordre, qui ont visiblement reçu la consigne de ne pas se livrer à une répression aveugle. L’Algérie retient son souffle : il est rare, dans ce genre de situation, que cette attitude responsable se prolonge très longtemps. Il faut trouver une issue à l’impasse algérienne.

Puisqu’il est conscient de la légitimité du mouvement de protestation populaire, le président Bouteflika devrait aller jusqu’au bout de son raisonnement et renoncer dès maintenant. La convocation d’une conférence nationale, réunissant tous les partis politiques, y compris ceux qui sont au pouvoir, susceptibles de participer à des élections libres et justes, est tout à fait envisageable. Accepter de mettre en place un processus historique de transition négociée serait le meilleur service que puisse rendre Abdelaziz Bouteflika à ses concitoyens : une réponse à la mesure de leur « civisme ».

Le Monde

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner

Voir les contributions

Réutiliser ce contenu

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.