Ce n’est pas parce que son parti, le Congrès national africain (ANC), a remporté une victoire électorale que son président, Cyril Ramaphosa, peut estimer avoir gagné. Au lendemain des élections générales du mercredi 8 mai en Afrique du Sud, les résultats quasi définitifs sont tombés, vendredi en fin d’après-midi. Sur la base de 95 % des suffrages décomptés par la Commission électorale indépendante (IEC), ils donnent l’ANC en tête, avec 57,73 % des suffrages.
Le parti de la lutte contre l’apartheid, le parti des géants – à commencer par Nelson Mandela –, mais aussi le parti de la corruption et du doute de l’électorat acquis à sa cause depuis vingt-cinq ans, devrait obtenir la majorité au Parlement (avec 230 sièges sur 400), et être en mesure de faire élire son candidat, M. Ramaphosa, comme président de la République, le 22 mai.
Les effets de la décennie de dérives clientélistes de l’ex-président Jacob Zuma, de 2009 à 2018, sont passés comme une lame de fond, secouant rudement sans faire chavirer le navire ANC. Lorsque Cyril Ramaphosa s’est imposé à la tête du parti en décembre 2017, puis à la tête de l’Afrique du Sud un mois et demi plus tard, il avait récupéré un parti confronté au risque de perdre sa majorité lors de futures élections nationales pour la première fois depuis son accession historique au pouvoir en 1994.
A bord du navire ANC, la mutinerie gronde encore
En un peu plus d’une année, Cyril Ramaphosa n’a pas pu changer l’Afrique du Sud, mais il est parvenu à restaurer une marge d’espoir et de confiance suffisante auprès d’une partie de l’électorat pour éviter cette sanction.
Il y a eu, au cours de ce scrutin, des incidents inédits en Afrique du Sud : l’encre indélébile passée sur les doigts des votants s’est avérée lavable ; un certain nombre d’individus a pu voter deux fois. Tout ceci donnera lieu à des processus de contestation. La date de publication des résultats s’en trouvera repoussée. Il n’y a cependant guère de chance que cela conduise à un renversement des résultats.
L’ANC se garde bien de triompher. Le parti revient de loin. A bord, la mutinerie gronde encore : les partisans de l’ex-chef de l’Etat, emmenés par le secrétaire général de l’ANC, Ace Magashule, ont tout fait pour s’opposer à Cyril Ramaphosa, depuis février, lorsque Jacob Zuma a été contraint de quitter le pouvoir.
Le président avait besoin d’une victoire éclatante pour s’imposer à la tête du parti. Il va devoir convaincre que ce score suffit à la démonstration. Ce ne sera pas facile. Il en va à la fois de sa marge de manœuvre pour réformer le pays comme de sa survie au sommet de l’Etat et du parti. Chaque responsable est « déployé » par l’ANC, dont les organes dirigeants peuvent décider du sort de tous, y compris des présidents.
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