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Etats-Unis : Donald Trump annonce le retrait militaire américain de Syrie

« Nous avons vaincu l’EI en Syrie, ma seule raison d’y être », a justifié Donald Trump en annoncant le départ des 2 000 soldats américains sur place.

Par  et  (Washington, correspondant)

Publié le 19 décembre 2018 à 18h22, modifié le 20 décembre 2018 à 10h55

Temps de Lecture 11 min.

Patrouille des forces américaines près d’Al-Darbasiyah (Syrie), à la frontière syro-turque le 4 novembre.

Donald Trump a tranché : les Etats-Unis devraient rapidement retirer leurs forces spéciales du nord-est de la Syrie, où elles avaient été déployées pour lutter contre l’organisation Etat islamique (EI). « Nous avons vaincu l’EI en Syrie, ma seule raison d’y être pendant la présidence Trump », a assuré le président des Etats-Unis sur son compte Twitter, mercredi 19 décembre.

« Nous avons gagné. (...) Il est temps que nos troupes rentrent à la maison. Nos garçons, nos jeunes femmes, nos hommes, ils rentrent tous, et ils rentrent maintenant », a-t-il ensuite confirmé dans une vidéo, publiée dans la soirée. Ce retrait pourrait être achevé d’ici à un mois et il a déjà commencé, selon un communiqué de la porte-parole de la Maison Blanche, Sarah Sanders, publié dans la matinée, sans que la Maison Blanche n’apporte la moindre précision chiffrée.

Dans une équation régionale particulièrement complexe, le rôle du contingent américain de 2 000 hommes, présents sans le moindre mandat international, dépassait pourtant la mission d’éradication du djihadisme. Il tenait aussi à distance les forces du régime de Bachar Al-Assad, avec lequel Washington a rompu au début de la guerre civile, et leurs alliés iraniens, ainsi que celles de la Turquie. Leur présence sur place protège en effet les forces locales à dominante kurde qui s’étaient portées au premier rang de la bataille contre l’EI. Ankara considère ces dernières comme une extension du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) que le pays combat militairement à l’intérieur de ses frontières.

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, avait assuré, lundi, avoir le feu vert de Washington pour que « les groupes terroristes soient chassés de l’est de l’Euphrate ». « Nous pouvons enclencher nos opérations en Syrie à n’importe quel moment à partir des territoires qui correspondront à nos projets », avait-il averti. Une menace qui peut désormais se concrétiser.

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Tensions internes à Washington

Donald Trump, à la Maison Blanche, le 18 décembre.

Alors que la lutte contre les djihadistes a enregistré, le 14 décembre, un succès décisif avec la prise par les milices kurdes de la localité de Hagine, située près de la frontière avec l’Irak, dans la vallée de l’Euphrate, le Pentagone et le département d’Etat ont longtemps milité pour le maintien des forces spéciales américaines. A la fois pour éviter une résurgence du djihadisme, et au nom du levier que leur présence octroyait à Washington, notamment dans la quête difficile d’une sortie politique de la guerre civile qui a ravagé la Syrie.

Ces tensions internes sur la présence américaine en Syrie pourraient toujours avoir cours malgré les déclarations du président américain. D’après le New York Times, des responsables du Pentagone essayaient encore, mercredi matin, heure de Washington, de convaincre le président Trump de revenir sur la décision. « La campagne contre l’EI n’est pas terminée », a maintenu le Pentagone, sur un ton plus nuancé que le tweet présidentiel, précisant qu’il ne fournirait aucun détail pour des raisons de sécurité.

Dans un communiqué publié peu après le tweet de M. Trump, Sarah Huckabee Sanders, porte-parole du président, a encore ajouté à la confusion en déclarant : « Nous avons commencé à faire rentrer les troupes américaines à la maison, alors que nous passons à la phase suivante de cette campagne ». Une déclaration qui ne permettait pas d’écarter totalement l’hypothèse d’un retrait qui ne serait que partiel.

Le spectre du retrait d’Irak

Le président des Etats-Unis n’avait pourtant pas eu de mots assez critiques contre le retrait américain d’Irak ordonné par Barack Obama en 2011, jugé précipité. Ce retrait, conforme à l’engagement du président démocrate, avait privé les Etats-Unis d’influence sur le gouvernement dirigé par Nouri Al-Maliki. Les dérives sectaires de ce dernier avaient contribué à la renaissance du djihadisme et à l’avènement de l’EI.

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S’il se concrétise, le retrait des forces américaines se traduirait par l’abandon de toute stratégie syrienne par Washington. Le président n’aurait pas été le premier à reculer sur ce dossier. L’inertie de son prédécesseur a permis à la Russie de faire un retour spectaculaire au Levant, en 2015. Après le renoncement américain de mercredi, le président russe, Vladimir Poutine, y sera plus que jamais en position d’arbitre.

L’autre grand bénéficiaire de cette décision est Bachar Al-Assad. Devant l’Atlantic Council, un cercle de réflexion de Washington, le représentant spécial de la diplomatie américaine pour la Syrie, James Jeffrey, avait assuré, lundi, que Washington voulait « voir un régime qui soit fondamentalement différent », tout en assurant ne pas vouloir se « débarrasser d’Assad ».

Une victoire pour Poutine et Bachar Al-Assad

Ces attentes risquent d’être considérablement déçues s’il ne reste plus à Washington et à ses alliés européens que le levier de la reconstruction dans un pays qui aura besoin de centaines de milliards de dollars pour se relever des ruines.

D’après un responsable des autorités à dominante kurde alliées à Washington en place dans le nord-est de la Syrie, « en cas de retrait des forces de la coalition et d’agression turque, nous n’aurons d’autre choix que d’appeler Damas à prendre ses responsabilités, y compris sur le plan militaire pour défendre le territoire syrien. L’inquiétude est très grande. »

Le retrait américain de Syrie ajoute enfin une note discordante à la stratégie offensive de Washington visant l’Iran. Donald Trump abandonne en effet un terrain sur lequel l’influence iranienne s’est faite plus pesante à la faveur de la guerre civile. Cette même influence que les Etats-Unis ne cessent de dénoncer.

Seul responsable étranger à avoir réagi, mercredi soir, à ces informations, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a déclaré qu’Israël, informé par avance par les Etats-Unis, allait étudier les retombées d’un retrait américain de Syrie, mais « saurait se défendre » contre les éventuelles menaces venues de chez son voisin.

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