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Exposition : vivacité des arts japonais sous l’ère Meiji

Le Musée Guimet, à Paris, montre, en trois cents œuvres et objets d’art, les splendeurs du Japon impérial.

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Publié le 31 octobre 2018 à 09h54, modifié le 31 octobre 2018 à 09h55

Temps de Lecture 4 min.

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Photographie de l’empereur Mutsuhito (1852-1912) en costume occidental, le 8 octobre 1873, par Kuichi Uchida (1844-1875), épreuve sur papier albuminé, colorée.

On le découvre sur une photographie datée du 8 octobre 1873, assis dans un fauteuil Louis XVI en tenue militaire occidentale, pantalon et veste ajustés à galons, raie sur le côté, fine moustache, sabre à la ceinture, un bicorne posé près de lui. C’est l’une des très rares représentations photographiques de l’empereur Mutsuhito (1852-1912), dont le règne, de 1867 à 1912, se traduisit par une transformation tellement radicale du Japon qu’on lui a donné le nom d’ère « Meiji » (« politique de la lumière »). Cette photographie figure en ouverture de l’exposition « Meiji, splendeurs du Japon impérial », présentée au Musée national des arts asiatiques-Guimet, à Paris, à l’occasion des 150 ans du début de cette période. Une époque d’ouverture du pays sans précédent, après deux cent cinquante ans de repli sur soi, qui s’accompagne de bouleversements dans tous les domaines – politique, économique, sociétal, religieux, culturel, artistique.

« Le Japon devenu empire se dotera d’un Parlement, d’un code civil de droit romain, d’une conscription mettant à bas les reliques de l’antique système des samouraïs, interdira le port du sabre, encouragera l’adoption du costume occidental, s’industrialisera à une vitesse étonnante, changera l’aspect de ses villes… », expose Sophie Makariou, présidente du Musée Guimet et commissaire de l’exposition, avec le conservateur Michel Maucuer. Le pays entend désormais faire rayonner ses talents à travers le monde, et les artistes ont pour mission d’exalter sa puissance créatrice. Un goût pour le « japonisme », alimenté par les récits d’écrivains-voyageurs tel Pierre Loti (1850-1923) et par les industriels collectionneurs comme Emile Guimet (1836-1918) ou Henri Cernuschi (1821-1896), se manifeste alors en Occident.

  • « Ce portrait est connu à titre posthume sous le nom de Meiji. C’est une rare photographie officielle de l’empereur ‒ qui a accédé au trône en 1867, à l’âge de 15 ans ‒ , bien sûr orchestrée et mise en scène : il pose vêtu d’un costume militaire occidental. Cela signifie la fin du pouvoir des “shoguns”. L’uniforme est ici le signe de la modernité. »

    Uchida Kuichi (1844-1875) : « Mutsuhito, l’empereur Meiji » ‒ épreuve sur papier albuminé, colorée ‒ Japon, 8 octobre 1873

    « Ce portrait est connu à titre posthume sous le nom de Meiji. C’est une rare photographie officielle de l’empereur ‒ qui a accédé au trône en 1867, à l’âge de 15 ans ‒ , bien sûr orchestrée et mise en scène : il pose vêtu d’un costume militaire occidental. Cela signifie la fin du pouvoir des “shoguns”. L’uniforme est ici le signe de la modernité. » RMN-GP (MNAAG, PARIS)

  • « Ce type d’estampe fleurit sous l’ère Meiji. Cette ville de Yokohama a été créée pour les étrangers : on voit d’ailleurs des bateaux, symboles de richesse, de commerce et d’ouverture sur le monde extérieur. »

    Yokohama Utagawa Kuniteru II (1829-1874) : « Vue d’ensemble du quartier français » ‒ estampe (ukiyo-e, nishiki-e) ‒ Japon, 1872

    « Ce type d’estampe fleurit sous l’ère Meiji. Cette ville de Yokohama a été créée pour les étrangers : on voit d’ailleurs des bateaux, symboles de richesse, de commerce et d’ouverture sur le monde extérieur. » RMN-GP (MNAAG, PARIS) / THIERRY OLLIVIER

  • « Cet objet de très haute facture est un exemple parfait du savoir-faire lié au monde féodal japonais. Ici, le faucon représente la chasse, activité de la noblesse par excellence. »

    Sano Takachika : brûle-parfum en forme de faucon ‒ argent, or, bronze doré et laqué ‒ Japon, vers 1890

    « Cet objet de très haute facture est un exemple parfait du savoir-faire lié au monde féodal japonais. Ici, le faucon représente la chasse, activité de la noblesse par excellence. » THE KHALILI COLLECTIONS OF JAPANESE ART

  • « Ce triptyque ‒ qui rassemble en une seule scène trois estampes ‒ est un épisode qui prélude à la guerre sino-japonaise, évoquant la prise de l’île de Taïwan. Célèbre pour ses scènes nocturnes, l’artiste a ici réalisé un dessin de propagande. »

    Kobayashi Kiyochika (1847-1915) : « Prise des îles Pescadores (Hôko-Tô) et de Formose (Taïwan) » ‒ estampe, série de 33 triptyques, épisodes de la guerre sino-japonaise (1894-1895) ‒ Japon, 1895

    « Ce triptyque ‒ qui rassemble en une seule scène trois estampes ‒ est un épisode qui prélude à la guerre sino-japonaise, évoquant la prise de l’île de Taïwan. Célèbre pour ses scènes nocturnes, l’artiste a ici réalisé un dessin de propagande. » MNAAG, PARIS, DIST. RMN-GP / THIERRY OLLIVIER

  • « Ces petites statuettes ont appartenu à Clémence d’Ennery (1823-1898), collectionneuse d’art asiatique : elles représentent des démons, sorte d’animaux fantastiques qui sortent la nuit pour danser et troubler le sommeil des vivants. »

    Orchestre de monstres ‒ bois et corne ‒ Japon, seconde moitié du XIXe siècle

    « Ces petites statuettes ont appartenu à Clémence d’Ennery (1823-1898), collectionneuse d’art asiatique : elles représentent des démons, sorte d’animaux fantastiques qui sortent la nuit pour danser et troubler le sommeil des vivants. » MNAAG, PARIS, DIST. RMN-GP / THIERRY OLLIVIER

  • « Shibata Zeshin ‒ artiste très reconnu sous la fin de l’ère d’Edo ‒ s’intéresse à la qualité artistique d’une œuvre plutôt qu’aux techniques d’un objet. Dans ses réalisations, il met davantage l’accent sur le dessin et la créativité. »

    Shibata Zeshin (1807-1891) : boîte à papier (ryoshibako) et écritoire (suzuribako) à décor de symboles de bon augure ‒ bois, laque rouge et laque d’or (maki-e), nacre ‒ Japon, vers 1860-1870

    « Shibata Zeshin ‒ artiste très reconnu sous la fin de l’ère d’Edo ‒ s’intéresse à la qualité artistique d’une œuvre plutôt qu’aux techniques d’un objet. Dans ses réalisations, il met davantage l’accent sur le dessin et la créativité. » THE KHALILI COLLECTIONS OF JAPANESE ART

  • « Cette œuvre anonyme est réalisée en émaux cloisonnés ‒ pâte de verre colorée que l’on fait fondre sur du métal. La composition picturale a été faite pour plaire aux Occidentaux. »

    Promenade à bord d’une barque ‒ illustration du chapitre Ukifune du « Dit du Genji » ‒ émaux cloisonnés ‒ Japon, vers 1901

    « Cette œuvre anonyme est réalisée en émaux cloisonnés ‒ pâte de verre colorée que l’on fait fondre sur du métal. La composition picturale a été faite pour plaire aux Occidentaux. » THE KHALILI COLLECTIONS OF JAPANESE ARTS

  • « Ces deux vases ont été réalisés en or et en argent et portent sur leur col l’emblème du chrysanthème à seize pétales (la marque de l’empereur). Ils ont été fabriqués pour la Maison impériale. Ils pouvaient généralement servir de cadeau. »

    Tsukada Shukyo (1848-1914) : paire de vases ornés d’oies sauvages, commande de la Maison impériale ‒ émaux cloisonnés, argent, or ‒ Japon, vers 1910

    « Ces deux vases ont été réalisés en or et en argent et portent sur leur col l’emblème du chrysanthème à seize pétales (la marque de l’empereur). Ils ont été fabriqués pour la Maison impériale. Ils pouvaient généralement servir de cadeau. » THE KHALILI COLLECTIONS OF JAPANESE ART

  • « L’artiste reste fidèle à l’illustration multiple, même si le Japon la considère comme un art mineur. Cette œuvre est extraite d’un recueil de dessins dont le thème, très chinois, est utilisé de façon ironique : le saumon, symbole d’abondance et de bonheur, prend une tonalité inquiétante car il est grignoté ici par une souris. »

    Kawanabe Kyôsai (1831-1889) : « Souris mangeant une tête de poisson » ‒ page d’album « Dessins pour le plaisir » ‒ estampe nishike-e ‒ Japon, 1881

    « L’artiste reste fidèle à l’illustration multiple, même si le Japon la considère comme un art mineur. Cette œuvre est extraite d’un recueil de dessins dont le thème, très chinois, est utilisé de façon ironique : le saumon, symbole d’abondance et de bonheur, prend une tonalité inquiétante car il est grignoté ici par une souris. » RMN-GP (MNAAG, PARIS) / HARRY BRÉJAT

  • « Cette pièce, sobre et élégante, n’est pas une commande impériale mais bien privée. Et s’adapte à un goût raffiné. L’artiste venait de Kyoto, ville de l’artisanat noble au Japon, qu’il quitta pour rejoindre Yokohama, ville ouverte sur l’étranger. »

    Miyagawa Kôzan (1842-1916) : bol à décor d’aigrettes ‒ porcelaine à décor bleu et noir sous glaçure ‒ Yokohama, Japon, vers 1900-1910

    « Cette pièce, sobre et élégante, n’est pas une commande impériale mais bien privée. Et s’adapte à un goût raffiné. L’artiste venait de Kyoto, ville de l’artisanat noble au Japon, qu’il quitta pour rejoindre Yokohama, ville ouverte sur l’étranger. » VICTORIA AND ALBERT MUSEUM, LONDON

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Plus de trois cents pièces – porcelaines, céramiques, étoffes, laques, peintures, sculptures, meubles – témoignant de cette virtuosité ont été réunies grâce à de nombreux prêts, une part venant des collections de Guimet, une autre, importante, de la collection privée Nasser D. Khalili. Ces documents et objets illustrent les mutations opérées dans l’art, mais aussi dans la société japonaise tout entière, ce que souligne clairement le parcours thématique.

La première salle, où figure la photo de l’empereur – également représenté sur plusieurs lithographies en compagnie de son épouse, vêtue à l’occidentale en robe à crinoline –, montre la transformation du pays dès l’effondrement du shogunat, le régime militaire qui régissait le pays depuis près d’un millénaire. Des photographies et des estampes polychromes détaillent la modification du paysage urbain. Les villes côtières ouvertes aux étrangers, comme Yokohama ou Kobe, servent de modèles à la modernisation des grandes villes. L’architecture occidentale est adoptée pour les bâtiments officiels, les banques, les grands magasins. Le télégraphe, l’éclairage au gaz puis l’électricité font leur apparition, les communications se développent. C’est sous l’ère Meiji que s’ouvre la première ligne de chemin de fer reliant Yokohama et Tokyo, en 1872.

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