LETTRE DE PÉKIN
Nul dans le monde n’est censé l’ignorer : conformément au calendrier lunaire, c’est le 5 février que, cette année, la Chine célèbre le Nouvel An. Si l’événement n’a longtemps intéressé que les Chinois eux-mêmes, Pékin a décidé en 2001 – année de l’entrée de la Chine dans l’Organisation mondiale du commerce (OMC) – de faire de cette célébration un temps fort de son soft power. Depuis, les défilés de dragons et autres manifestations culturelles se multiplient un peu partout dans le monde. En 2019, 1 500 événements seront organisés dans 396 villes réparties dans 133 pays, annonce fièrement le ministère de la culture et du tourisme.
Comme chaque année, les Chinois profiteront de ces congés pour retrouver leurs familles ou partir en vacances et permettront aux professionnels du transport d’afficher de nouveaux records. Par la route (2,46 milliards de déplacements), le train (413 millions), l’avion (73 millions) ou le bateau (43 millions), près de 3 milliards de déplacements sont prévus durant le mois de février qui est, pour les Chinois les plus modestes, le seul où ils prennent des congés.
Si l’on en croit le succès phénoménal de la bande-annonce depuis la mi-janvier, des dizaines de millions de Chinois devraient également aller voir au cinéma le premier blockbuster de cette année du cochon : Peppa Pig célèbre le Nouvel An chinois. L’histoire d’un grand-père qui, n’ayant jamais entendu parler de Peppa Pig, héroïne (britannique) de dessins animés pour enfants, ne comprend pas vraiment ce que lui demande son petit-fils comme cadeau. S’ensuivent une série de quiproquos qui ne seront levés qu’au cours du traditionnel repas de famille.
Un film explicitement destiné à promouvoir les valeurs familiales quelque peu délaissées par une classe moyenne avant tout avide de consommation, comme l’avait montré l’admirable documentaire de Zhang Tao sorti en France à la fin de 2017, Le rire de Madame Lin.
« La tradition s’est maintenue »
Si le Nouvel An lunaire, dit chinois, est aujourd’hui mis en avant par les autorités, y compris ailleurs à l’étranger, il n’en a pas toujours été ainsi. « Durant la révolution culturelle, le Parti communiste voulait supprimer le traditionnel repas de raviolis que l’on mange à minuit. Mais le peuple a refusé et la tradition s’est maintenue », rappelle Tao Lifan, président honoraire de la société internationale pour le folklore asiatique, un vénérable professeur qui reçoit ses invités autour d’une impressionnante table en bois sculptée spécialement conçue pour la cérémonie du thé.
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