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Le combat des jeunes Argentines pour la légalisation de l’avortement

La légalisation de l’avortement, qui a été adoptée par les députés, est discutée mercredi 8 août au Sénat. Les jeunes Argentines jouent un rôle crucial dans cette lutte.

Par  (Buenos Aires, correspondante) et  (Buenos Aires, envoyée spéciale)

Publié le 07 août 2018 à 11h01, modifié le 08 août 2018 à 12h22

Temps de Lecture 5 min.

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  • Analia, 36 ans, étudiante. « Durant de nombreuses années, la maternité a été imposée, installant l’idée qu’avoir un enfant était la solution à tous nos problèmes, sans prendre en compte d’autres paramètres comme la présence du père, le désir, si c’était le fruit d’un viol, si la santé de la femme est en danger… Ce qui est sûr, c’est que nous avortons, mais celle qui a de l’argent s’en sort, alors que celle qui n’en a pas le fera dans des conditions terribles. »

    Analia, 36 ans, étudiante. « Durant de nombreuses années, la maternité a été imposée, installant l’idée qu’avoir un enfant était la solution à tous nos problèmes, sans prendre en compte d’autres paramètres comme la présence du père, le désir, si c’était le fruit d’un viol, si la santé de la femme est en danger… Ce qui est sûr, c’est que nous avortons, mais celle qui a de l’argent s’en sort, alors que celle qui n’en a pas le fera dans des conditions terribles. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

  • Julieta, 29 ans, médecin. « Il y a quinze ans, j’ai accompagné une amie de mon école [se faire avorter]. Nous l’avons vécu comme un moment traumatique, plein de douleur et de pleurs. Il y a un an, j’ai de nouveau accompagné une autre amie et j’ai senti une grande différence. Plus de tranquilité, nous avons pris le temps d’être bien, nous avons su gérer la douleur. C’est ce que nous avons déjà gagné, au moins dans la capitale, une conquête sociale et culturelle par rapport à l’avortement. Grâce à notre présence dans la rue, aujourd’hui nous pouvons vivre plus libres. »

    Julieta, 29 ans, médecin. « Il y a quinze ans, j’ai accompagné une amie de mon école [se faire avorter]. Nous l’avons vécu comme un moment traumatique, plein de douleur et de pleurs. Il y a un an, j’ai de nouveau accompagné une autre amie et j’ai senti une grande différence. Plus de tranquilité, nous avons pris le temps d’être bien, nous avons su gérer la douleur. C’est ce que nous avons déjà gagné, au moins dans la capitale, une conquête sociale et culturelle par rapport à l’avortement. Grâce à notre présence dans la rue, aujourd’hui nous pouvons vivre plus libres. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

  • Brenda, 24 ans, étudiante. « Je milite pour la vie, parce c’est notre droit premier, celui de vivre. Si on nous enlève ce droit, nous n’en aurons pas d’autres. Je suis chrétienne et j’aime Dieu et sa parole, et l’un de ses commandements est “tu ne tueras point”. Dans la science aussi, quand le spermatozoide et l’ovule s’unissent, la vie démarre, et moi je crois en la vie à partir de la conception. »

    Brenda, 24 ans, étudiante. « Je milite pour la vie, parce c’est notre droit premier, celui de vivre. Si on nous enlève ce droit, nous n’en aurons pas d’autres. Je suis chrétienne et j’aime Dieu et sa parole, et l’un de ses commandements est “tu ne tueras point”. Dans la science aussi, quand le spermatozoide et l’ovule s’unissent, la vie démarre, et moi je crois en la vie à partir de la conception. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

  • Marcos, 26 ans, commerçant. « La vie commence dans le ventre de la mère. C’est une différence de conception que nous avons avec les “bandanas verts” [les pro-avortements légal], qui pensent que la vie n’a pas encore commencé à ce moment. Je pense aussi qu’il y a d’autres solutions : une meilleure éducation sexuelle, plus d’accompagnement et aussi une amélioration du système d’adoption. Ici, les démarches sont longues et lentes, beaucoup de personnes souhaitant adopter ne peuvent pas. Alors, même si nous sommes contre ce projet de loi, la loi actuelle ne doit pas rester telle qu’elle est aujourd’hui. »

    Marcos, 26 ans, commerçant. « La vie commence dans le ventre de la mère. C’est une différence de conception que nous avons avec les “bandanas verts” [les pro-avortements légal], qui pensent que la vie n’a pas encore commencé à ce moment. Je pense aussi qu’il y a d’autres solutions : une meilleure éducation sexuelle, plus d’accompagnement et aussi une amélioration du système d’adoption. Ici, les démarches sont longues et lentes, beaucoup de personnes souhaitant adopter ne peuvent pas. Alors, même si nous sommes contre ce projet de loi, la loi actuelle ne doit pas rester telle qu’elle est aujourd’hui. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

  • Laura, 37 ans, journaliste et membre de la campagne pour le droit à l’avortement. « Ce qui m’émeut le plus, c’est de voir trois générations ensemble dans cette lutte pour le droit à l’avortement, et surtout de voir la force et la puissance des plus jeunes. Que la loi soit votée ou non, nous savons qu’elles ne s’arrêteront pas là et qu’elles obtiendront ce droit. »

    Laura, 37 ans, journaliste et membre de la campagne pour le droit à l’avortement. « Ce qui m’émeut le plus, c’est de voir trois générations ensemble dans cette lutte pour le droit à l’avortement, et surtout de voir la force et la puissance des plus jeunes. Que la loi soit votée ou non, nous savons qu’elles ne s’arrêteront pas là et qu’elles obtiendront ce droit. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

  • Laura, 30 ans, enseignante à l’université et doctorante. « En tant que mère, je ne comprends pas comment certaines femmes se voient obligées d’être mère, à avoir des enfants sans réellement les désirer. Cela me fend le cœur pour ces femmes, pour ces enfants aussi. La maternité ne doit pas être une obligation. C’est pour ça que je lutte pour le droit de toutes à décider. »

    Laura, 30 ans, enseignante à l’université et doctorante. « En tant que mère, je ne comprends pas comment certaines femmes se voient obligées d’être mère, à avoir des enfants sans réellement les désirer. Cela me fend le cœur pour ces femmes, pour ces enfants aussi. La maternité ne doit pas être une obligation. C’est pour ça que je lutte pour le droit de toutes à décider. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

  • Omar, 49 ans, policier. « Nous avons tous le droit à la vie, celui qui va naître, mais bien sûr aussi la femme, que nous défendons. Nous soutenons la vie que Dieu a établi pour chacun d’entre nous, chaque citoyens de cette Terre, avec pour unique fin la paix dans le monde. »

    Omar, 49 ans, policier. « Nous avons tous le droit à la vie, celui qui va naître, mais bien sûr aussi la femme, que nous défendons. Nous soutenons la vie que Dieu a établi pour chacun d’entre nous, chaque citoyens de cette Terre, avec pour unique fin la paix dans le monde. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

  • Malena, 20 ans, étudiante. « Ce projet ne devrait même pas être débattu. J’ai entendu le battement du cœur de mon bébé à partir de sept semaines, et l’avortement consiste à arrêter ce cœur. Je ne changerai pas d’avis. Je suis heureuse de voir qu’aujourd’hui nous sommes nombreux à penser ainsi. »

    Malena, 20 ans, étudiante. « Ce projet ne devrait même pas être débattu. J’ai entendu le battement du cœur de mon bébé à partir de sept semaines, et l’avortement consiste à arrêter ce cœur. Je ne changerai pas d’avis. Je suis heureuse de voir qu’aujourd’hui nous sommes nombreux à penser ainsi. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

  • Gladys, 25 ans, militante. « Ce qui m’anime, c’est le désir de tout changer, faire exploser en moi cette lutte, qui, en tant que lesbienne et féministe, grandit petit à petit. Je suis si fière de faire partie de cette lutte historique que nous menons avec le mouvement féministe. J’apprends, et je continue à grandir, entourée et de manière collective. »

    Gladys, 25 ans, militante. « Ce qui m’anime, c’est le désir de tout changer, faire exploser en moi cette lutte, qui, en tant que lesbienne et féministe, grandit petit à petit. Je suis si fière de faire partie de cette lutte historique que nous menons avec le mouvement féministe. J’apprends, et je continue à grandir, entourée et de manière collective. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

  • Claudia, 47 ans, pasteure de l’Eglise Dios Viviente. « En tant qu’enfants de Dieu, nous savons que la vie est divine, et nous devons être prêts à lutter pour elle. C’est pour ça qu’aujourd’hui nous sommes venus à ce rassemblement pour la vie. Argentins mais aussi Boliviens, nous sommes ici de toutes les nations pour dire oui à la vie. »

    Claudia, 47 ans, pasteure de l’Eglise Dios Viviente. « En tant qu’enfants de Dieu, nous savons que la vie est divine, et nous devons être prêts à lutter pour elle. C’est pour ça qu’aujourd’hui nous sommes venus à ce rassemblement pour la vie. Argentins mais aussi Boliviens, nous sommes ici de toutes les nations pour dire oui à la vie. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

  • Carina, 32 ans, femme au foyer. « Ce projet de loi enfreint la loi de la vie, la Constitution argentine et les lois biologiques qui disent que la conception est le commencement de la vie humaine. On doit respecter et défendre l’enfant jusqu’à ses 18 ans. Nous devons faire respecter la loi morale et institutionnelle de notre République. Notre pays ne peut pas permettre ça, c’est un coup dur pour toute l’humanité. »

    Carina, 32 ans, femme au foyer. « Ce projet de loi enfreint la loi de la vie, la Constitution argentine et les lois biologiques qui disent que la conception est le commencement de la vie humaine. On doit respecter et défendre l’enfant jusqu’à ses 18 ans. Nous devons faire respecter la loi morale et institutionnelle de notre République. Notre pays ne peut pas permettre ça, c’est un coup dur pour toute l’humanité. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

  • Nelly, 89 ans, avocate spécialiste du droit de la famille et de la femme, militante historique. « C’est un long chemin que nous avons parcouru. Nous sommes convaincues que la science, le juridique et le biologique appuient notre position pour que l’avortement légal soit un droit humain. C’est une lutte très difficile, mais si cette loi n’est pas votée – même si je pense qu’elle le sera –, on aura déjà gagné un million de jeunes dans les rues le 13 juin et 2 millions mercredi. Ces jeunes, ce sont les futurs transmetteurs de ces droits. Alors si ce n’est pas cette année, ce sera l’année prochaine. »

    Nelly, 89 ans, avocate spécialiste du droit de la famille et de la femme, militante historique. « C’est un long chemin que nous avons parcouru. Nous sommes convaincues que la science, le juridique et le biologique appuient notre position pour que l’avortement légal soit un droit humain. C’est une lutte très difficile, mais si cette loi n’est pas votée – même si je pense qu’elle le sera –, on aura déjà gagné un million de jeunes dans les rues le 13 juin et 2 millions mercredi. Ces jeunes, ce sont les futurs transmetteurs de ces droits. Alors si ce n’est pas cette année, ce sera l’année prochaine. » Anita Pouchard Serra / Hans Lucas pour Le Monde

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Elles ont entre 13 et 18 ans, utilisent le langage inclusif dans leur vie de tous les jours, mettent des paillettes vertes sur leurs paupières et n’ont de leçons à recevoir de personne. Lors du débat sur la légalisation de l’avortement en Argentine, qui doit être mené mercredi 8 août par le Sénat, les adolescentes ont joué un rôle crucial en sortant dans les rues, en attachant à la lanière de leurs sacs à dos le foulard vert symbole du droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) et en bousculant leurs aînés pour exiger ce qui leur semble naturel : le droit à disposer de leurs corps.

Elles ne demandent pas, elles exigent : « Les filles ont déjà choisi, avortement légal maintenant ! » Avant le vote des députés en première lecture, le 14 juin, une dizaine d’établissements scolaires ont été occupés par leurs élèves.

Leur idole a 18 ans. Ofelia Fernandez, ancienne élève du lycée Carlos-Pellegrini, un établissement de l’élite intellectuelle, est intervenue le 29 mai devant les députés lors des débats sur le projet de loi, dans un discours vibrant qui a marqué les esprits.

« Il va falloir vous faire à l’idée que nous voulons un autre genre de vie », avait lancé Ofelia Fernandez, 18 ans, face aux députés

Foulard vert au cou, la jeune fille donne rendez-vous au Monde dans un bar. Son discours est radical, sans concessions. « Il va falloir vous faire à l’idée que nous voulons un autre genre de vie (…). L’avortement clandestin existe et tue, les femmes pauvres et les hommes trans meurent ! », avait-elle lancé aux députés. Elle le répète aujourd’hui : le droit à l’avortement s’inscrit dans un cercle plus large de revendications. En creux, c’est le droit au plaisir des femmes, à leur autonomie et la critique d’une « sexualité hégémonique et hétéronormée », dit-elle, qui sont en jeu.

Ofelia Fernandez, 18 ans, à Buenos Aires, le 5 août.

Encore plus jeune, Cloe Barrios Samuel, 13 ans, est féministe depuis ses 11 ans. « Dans quelques années, nous pourrons voter, et nous nous souviendrons ! », affirme-t-elle. Elève du collège public Mariano-Acosta, aussi connu pour son niveau d’excellence, elle affirme qu’elle ne votera jamais pour quelqu’un qui s’est opposé à la loi.

Une journaliste du quotidien Pagina/12, Luciana Peker, parle d’une « révolution des filles ». « Les Incroyables Hulk d’Argentine n’ont pas une overdose de muscles, elles mettent des paillettes contre l’invisibilisation historique du machisme », a écrit cette spécialiste du genre. Ofelia Fernandez va plus loin : « La plupart de nos aînés apprennent de nous », glisse-t-elle, un brin provocatrice. De fait, des députés ont reconnu que leur position sur l’avortement avait changé grâce à leurs filles.

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